novembre 28

Étiquettes

Modèle social français…on n’est plus les champions !

Argent et santé se mêlent dans le système français. Photo Lucie Marmey

La France est l’un des pays qui consacre la plus grande part de ses ressources à la protection sociale : un tiers de son produit intérieur brut ! Ce qui contribue au mythe du « meilleur système social au monde ». Pourtant, l’Hexagone fait face à des dépassements d’honoraires extraordinaires et à des zones rurales ou quartiers pauvres privés de médecins. Et ce n’est pas nouveau : le système de soins se dégrade depuis quarante ans. Au-delà du vieillissement de la population, de l’augmentation de l’espérance de vie et de la hausse du chômage, c’est tout un modèle social qui est remis en question.

L’âge d’or de la sécu

En 1980, la Sécurité sociale est à son apogée. La multiplication des scandales de santé publique comme l’affaire du sang contaminé en 1991 conduisent les politiques à se doter d’une administration plus dense. L’État accentue son rôle de tutelle dans le système de santé en se réservant la maîtrise des prix des médicaments. Les assurés voient leurs frais pris en charge à 80%, tandis que l’hôpital public bénéficie d’investissements importants en équipements et en salaires. Résultat ? Un formidable essor que la planète nous envie ! Mais ce progrès a un coût : les dépenses augmentent rapidement au moment même où la France entre dans la crise.

La société française est la meilleure : un mythe. La meilleure sécurité sociale : un fait.

Certains historiens, comme le canadien Timothy Smith, n’hésitent pas à affirmer que la France « n’est pas à la hauteur de la réputation qu’elle cherche à se donner : un pays de haute protection sociale ». L’Hexagone est en période de profondes interrogations sur les performances économiques du pays, faisant ressurgir le débat sur le modèle français. Désormais, c’est « la question du chômage qui distingue et hante le modèle social français », affirme Julien Damon, professeur associé à Sciences Po. Il explique que la France est fondée sur un compromis entre le capitalisme et les forces de marché d’une part ; le socialisme, la redistribution et la production publique d’autre part. Un pourcentage important des revenus est redistribué par l’impôt à la protection sociale, ce qui donne une image de solidarité forte à l’étranger. Pierre Laroque, père de la sécurité sociale, avait néanmoins évoqué une possible remise en question du système : « La difficulté rencontrée par une classe à obtenir ce qu’elle recherche, dans le cadre de la structure existante, peut la conduire progressivement à remettre en cause cette structure. »

En comparaison de nos voisins européens, la sécurité sociale française reste très avantageuse. Un Allemand doit travailler un an avant de pouvoir pointer au chômage. Un français, 4 mois. L’indemnisation maximale chez nos voisins germaniques est de 2000 euros, en France, de 6500 euros. Enfin, outre-Rhin, au bout du troisième refus d’emploi, les allocations sont supprimées, en France on n’oblige pas un ancien instituteur à devenir maçon. Si la société française n’est sûrement pas la meilleure, sa sécurité sociale, c’est un fait, l’est bel et bien.

Sans cotisations, pas de protection

Pourtant, d’après le hors-série Problème économique de septembre, le modèle social français s’intéresse surtout aux classes moyennes ou supérieures et pas véritablement aux pauvres. Son premier objectif est de protéger les personnes déjà employées. Les jeunes, les femmes, les immigrés et les chômeurs seraient particulièrement défavorisés. Autre problématique, les retraités. Quand on sait qu’en 2060 la France devrait compter 5,4 millions de personnes âgées de plus de 85 ans, l’État panique.  Comment rémunérer autant de personnes ? Apparemment, avec des prélèvements record et des prestations en baisse. Le Monde diplomatique s’en indigne : « La sécurité sociale c’est-à-dire l’argent des assurés-sociaux n’a pas vocation à étoffer les revenus et les profits des professionnels et de l’industrie sans contrepartie pour la santé de la population. » Les quatre services publics clefs de la santé, qui ont fait le mythe d’un système français exceptionnel, devraient pouvoir être maintenus : sécurité sociale, médecine de proximité, hôpital et enfin sécurité sanitaire et prévention collective.

Marie Gonzales