Que faut-il savoir sur la réforme bancaire ?

Après de longs débats sur le mariage pour tous, l’Assemblée Nationale a commencé l’examen de la loi sur la séparation bancaire, soumise au Parlement le 12 février dernier. Entre les promesses électorales de François Hollande et aujourd’hui, le texte a changé plusieurs fois.

La proposition d’un candidat en campagne

La loi de séparation bancaire est la septième proposition qui figure dans le programme électoral de François Hollande. Le but de cette loi est d’empêcher que les éventuels problèmes financiers des banques ne se répercutent sur les clients particuliers. Pour se faire, ce projet de loi prévoit de séparer les activités des banques en deux : d’un côté les activités de crédit et de l’autre les activités spéculatives. Elle a aussi pour but d’éviter les paradis fiscaux en surveillant de plus près les actions des banques.

L’élément déclencheur à l’initiative de cette loi est bien évidemment la crise financière de 2008. Les clients des banques les plus touchées par la crise avaient perdu la totalité de leurs économies suite à l’effondrement complet de ces dernières.
L’efficacité de ce projet de loi est contestable quand on sait que certaines banques qui ont fait faillite avec la crise ne mélangeaient pas ces deux activités. La banque américaine Lehman Brothers, symbole de la crise de 2008, était par exemple une banque d’investissement qui n’ouvrait pas de comptes aux particuliers.

Un premier revirement

Pierre Moscovici présente la loi sur la réforme bancaire. Photo : AFP

Pierre Moscovici présente la loi sur la réforme bancaire. Photo : AFP

Un an après la proposition du président François Hollande, le texte est pourtant bien différent du projet d’origine. On assiste à revirement dans le projet de loi de la part du pouvoir exécutif. Plus question d’une séparation pure et simple des activités, mais d’une limitation des actions d’investissement à des actions « utiles pour l’économie ». Cette notion d’utilité n’est pas définie clairement et reste très floue.

Les principales explications à ces modifications sont la pression des lobbys et des banques et la peur de modifier le système bancaire. Les changements imposés par l’exécutif sont jugés trop peu contraignants par beaucoup de députés PS.
Le texte de loi est moins ambitieux que la proposition initiale. Le ministre de l’Économie et des Finances Pierre Moscovici l’admet en ajoutant que le modèle actuel a « été plus résistant à la crise que les autres ».
Auditionnés par la commission des Finances, les patrons des plus grandes banques françaises ont jugé que ce texte n’aurait que très peu d’impact sur leurs activités.

Un texte dénaturé ?

La pression mise par les députés de gauche sur le gouvernement a été fructueuse. Les députés ont présenté plusieurs amendements dont deux principaux, et Pierre Moscovici s’est déclaré favorable à des amendements parlementaires. Le premier veut que la « tenue de marché », c’est à dire l’achat et la vente de titres par la banque pour un de ses clients, soit incluse dans les activités de spéculation à partir d’un certain seuil.
Le second amendement oblige les banques à publier leurs activités en détail et pays par pays pour lutter contre les paradis fiscaux. Même si ces amendements durcissent un peu le texte du projet de loi, ce dernier reste encore loin de la proposition initiale et de ses contraintes.
La volonté de changer en profondeur le système bancaire n’a donc pour l’instant pas abouti. Reste un texte dont l’efficacité est mise en doute et qui ne répond plus entièrement aux attentes initiales.

Suivez l’avancée du Projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, n° 566, déposé le 19 décembre 2012 en 1ère lecture ici.

Alexandre Baron