Théorie du genre : vérités et fantasmes

Un texto étrange reçu par des parents d’élèves, une rumeur répandue comme une pandémie et un épouvantail : la désormais fameuse théorie du genre.

Tout est parti d'un sms en chaîne (crédits photos : L.M)

Tout est parti d’un sms en chaîne (crédits photos : L.M.)

Le microcosme des écoles primaires a connu récemment un bouleversement d’une rare brutalité. À l’origine : un sms en chaîne transmis de parents d’élèves en parents d’élèves. Le message, au sens obscur, mettait en garde les parents contre la « théorie du genre », nouvelle philosophie supposée de l’Éducation nationale et aux implications inquiétantes.
Dès lors, pis que pendre a été entendu, et relayé de fait par des témoignages toujours plus surréalistes : de « l’incitation à l’homosexualité » à l’ « éducation sexuelle explicite et précoce ». Pas étonnant que des parents aient pris peur. Le message était complété d’une invitation à la désobéissance civile, sous forme d’une journée de boycott mensuel des écoles en signe de protestation. Une mauvaise parodie du combat pour l’égalité mené en son temps par Martin Luther King.
Une campagne de désinformation impressionnante orchestrée par des groupuscules relevant de l’extrême droite. Le climat délétère instauré par les retombées du Mariage pour tous a été le terreau fertile de cette manipulation.

« L’ Éducation nationale réfute cette rumeur (crédits photo : D.R) »

L’ Éducation nationale réfute cette rumeur (crédits photo : D.R.).

L’Évolution, un processus lent

En pratique, la ou plutôt les théories du genre relèvent d’un domaine d’étude universitaire. Inspirées de la sociologie, ces recherches visent à établir le poids de l’habitus social dans la répartition sexuée des tâches (lien?). En clair, il s’agit de démontrer que si Monsieur travaille quand Madame s’occupe des enfants, c’est parce que des siècles de culture l’ont établi ainsi.
Une confusion a été faite avec les études de genre (gender studies), autre domaine de recherche universitaire pluridisciplinaire ayant notamment nourri le féminisme des années 60 et 70.
L’ Éducation nationale n’a jamais validé de telles mesures. En pratique, elle a décidé de repenser son influence sur les comportements sexués afin d’en réduire la contrainte sociale. Une volonté de gommer l’influence de la société pour réduire les inégalités entre les sexes. Une réflexion qu’il était temps de mener à l’époque où les inégalités hommes/femmes (de salaire, par exemple) n’ont plus leur place sur le papier mais subsistent en pratique.
C’est tout un système de valeur qui est à repenser. Comme tout changement, la méfiance qui en découle va bien au-delà de l’étendue des mesures proposées. Une énième preuve, s’il en fallait, que l’humanité est une espèce jeune, à la gestation lente et irrégulière.

Loïc Masson