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« Nous avons besoin de légumes, ils ont besoin de travailler »
Le 25 avril avaient lieu les journées portes ouvertes des Jardins de Cocagne à Mâcon (en Saône-et-Loire) . L’occasion de découvrir comment cette association allie agriculture et insertion.

Les Jardins de Cocagne de Mâcon comprennent douze serres, dont celle-ci avec des pommes de terre fraîchement plantées (crédit : Camille Degano)
« Le maraîchage bio, c’est une façon d’essayer de remettre les gens au travail ». Roland Tavel est fier de présenter l’association qu’il préside : Les Jardins de Cocagne de Mâcon. Cette structure créée en 1997 est un atelier d’insertion par l’activité économique. Comme une centaine de jardins en France , l’association permet de lutter contre les exclusions et la précarité ainsi que d’intégrer le secteur professionnel agricole local. Trois maraîchers professionnels encadrent ainsi vingt-huit jardiniers en réinsertion (au maximum) : « ces gens sont plus ou moins sortis de la vie sociale. Ils ont des soucis de mobilité et de plus en plus, le problème de la maîtrise du français », affirme Roland Tavel. Kada Hadidi travaille depuis un mois ici. Il se dit satisfait du fonctionnement de l’association : « j’aime le travail en collectivité. Je me sens à l’aise moralement et physiquement. Ça m’intègre et ça m’aide à construire un projet pour la suite ». Alexis Olivet, qui s’occupe du stand des plants avec Kada, y est quant à lui jardinier depuis deux ans et demi : « j’aime bien être dehors, cultiver les fruits et légumes ». Il travaillait en tant que paysagiste mais il n’y avait plus de travail. « J’ai découvert cette structure grâce à l’ANPE. Les Jardins de Cocagne, c’est un bon tremplin », ajoute-t-il. Le président souhaite d’ailleurs que tous les jardiniers trouvent une stabilité familiale et pécuniaire.

Alexis Olivet et Kada Hadidi sont deux jardiniers en réinsertion aux Jardins de Cocagne Mâcon (crédit : Camille Degano)
Bien, beau, bio !
« Tous ne continueront pas dans le maraîchage mais ici, ils apprennent à être responsables, ponctuels, des choses qu’ils ont peut-être perdues suite à un accident de vie », explique Patrick Leclercq, l’un des maraîchers encadrants. C’est à côté de l’une des douze serres dont il s’occupe, sa binette à la main, qu’il livre les méthodes pour la production légumière : la préparation et la fertilisation des sols, la surveillance des cultures et des maladies, les chantiers de plantation et d’irrigation, le suivi du désherbage ainsi que la gestion des récoltes. L’important est de suivre les techniques de l’agriculture biologique : « on s’organise pour semer en temps et en heure les légumes en fonction des saisons et du climat ». Les maraîchers font également attention au soin qu’il faut apporter aux plantes et à la lutte contre les maladies et les insectes. « On trouve des moyens naturels efficaces sans utiliser des produits issus de l’industrie chimique », garantit-il. D’autant plus qu’il y a près de huit hectares à gérer, entre les activités de plein champ, les serres et le verger.

Roland Tavel, président des Jardins De Cocagne Mâcon, et Patrick Leclercq, maraîcher professionnel lors de la journée portes ouvertes du 25 avril (crédit : Camille Degano)
« Ce qui est intéressant, c’est qu’on a des produits de saison »
Mais la météo peut aussi semer la panique. L’an dernier, la production a chuté, en raison d’un printemps très pluvieux, ce qui a engendré une baisse des revenus. Il faut donc s’adapter, surtout qu’il y a quelque 300 consommateurs-adhérents à satisfaire. Nicolas Todeschini en fait partie. Le « côté bio » et la démarche d’aider les gens en difficulté l’ont vite motivé. Cela fait maintenant quatre ans qu’il adhère et qu’il adore : « j’achète un panier duo par semaine [ndlr : environ 7,50 euros]. Ce qui est très intéressant, c’est qu’on a des produits de saison ». L’hiver, les paniers peuvent se recouper d’une semaine sur l’autre, on peut avoir deux fois du chou-fleur en quinze jours. Mais ce n’est pas le plus important pour Nicolas car il affirme savoir pourquoi il a fait ça. En cas de mauvaises récoltes ou pendant les faibles périodes, les paniers sont compensés soit par des réserves, soit en été – saison pendant laquelle les légumes sont plus abondants – des conserves et des sauces tomates viennent aussi compléter le panier. La directrice des Jardins de Cocagne de Mâcon, Bénédicte Flament, appelle les adhérents des »consomm’acteurs ». A juste titre puisque les consommateurs se font aussi, à l’occasion, bénévoles en aidant les jardiniers, notamment pour le désherbage, la reconstruction d’une serre ou pour des travaux annexes. Le président des Jardins de Cocagne note finalement que « le maraîchage bio, c’est le respect des consommateurs et de ceux qui cultivent ». De quoi faire vivre la devise : « Nous avons besoin de légumes, ils ont besoin de travailler ».
Camille Degano