Laurent Gannac, la terre dans la peau

Laurent Gannac, cultivateur bio d’agrumes à Menton, nous a ouvert les portes de son exploitation. Il nous raconte son parcours et son engagement pour un rapport sain à la nature.

S’il était un élément, ce serait la terre. La terre qu’il « caresse comme [il] caresse un chat ». La terre qu’il goûte comme un plat raffiné. La terre qu’il palpe, qu’il sent et apprécie tant. Avec son chapeau de paille et ses lunettes de soleil, Laurent Gannac décrit le miracle que représente pour lui cet élément si précieux : « la terre aboutit à ce que nous sommes, la vie. » Sa vie à lui, il la commence dans le Sud-Ouest de la France sur les terres du Quercy. Il accompagne alors son père le samedi s’occuper de jardins. D’abord pour se faire un peu d’argent de poche. Mais très vite, grâce à « Pierrot le jardinier », manipuler les végétaux devient une passion. Il se dirige dans des études d’horticulture et d’agronomie à Antibes. Un stage à Èze et le déclic pour la végétation méditerranéenne.

Une conscience écolo

Élevé dans un cadre familial strict, Laurent Gannac ne se projetait pas dans la famille. Pourtant son premier enfant naît alors qu’il n’a que 18 ans. Mon « parcours familial est un peu chaotique » avoue le quinquagénaire, marié et père de quatre enfants. Il se décrit comme quelqu’un d’excessivement entier : « quand je me consacre à quelque chose, je suis dans ma bulle. » Cette bulle se trouve maintenant sur les hauteurs de Menton, où il cultive des citrons et différents agrumes. Environ 300 arbres à chouchouter et 1000 de plus dans sa pépinière. La Maison du Citron est un cocon pour ces arbres fruitiers cultivés dans le cadre de l’opération de replantation du Citron de Menton. Attaché au terroir et au respect de l’environnement, c’est tout naturellement qu’il se tourne en 2013 vers une production 100 % bio. « Tout le monde devrait faire ça, c’est une évidence » martèle Laurent Gannac affirmant qu’il n’y a aucune différence de rendement.

Pour celui que l’on nommera jardinier et non agrumiculteur, lorsqu’il était ado dans les années 70, les gens avaient une conscience écologique, qu’il peine à observer maintenant : « on voit l’écologie comme une option politique. C’est plutôt du bon sens. Il faut ouvrir les yeux sur la façon dont fonctionne le monde. » L’homme qui serait prêt à descendre dans la rue s’il avait trente ans de moins critique sévèrement la non-prise en compte des problèmes environnementaux. Il se rappelle de ses vacances dans les Pyrénées-Orientales il y a deux ans. Laurent Gannac était effaré de voir, au milieu d’un site naturel, une poubelle remplie à ras bord que personne ne vidait : « ces gens sont rétrécis du cerveau ! Ils ne se projettent pas dans l’avenir » s’indigne-t-il.

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C’est sûrement pour cela que l’homme au chapeau de paille a voulu participer à l’émission Côté jardin sur France 3 de 2009 à 2012. Pour faire prendre conscience du rapport précieux entretenu par l’homme avec la terre. Mais quand on lui demande si ses activités sont fructifères, il s’en échappe en disant qu’il n’est commercialement pas bien placé. C’est en se rendant dans sa jungle de maison que Laurent Gannac préfère revenir au sujet de l’homme. « L’homme est cupide. Il adore un Dieu invisible pendant qu’il détruit la nature qui est visible ». Laurent Gannac, lui, a plutôt fait sienne la devise de Voltaire, en cultivant avec passion son jardin.

Camille Degano