Front national, parti d’ambitieux

Alors qu’il avait depuis longtemps l’image d’un parti uni, le Front national subit des dissensions de plus en plus importantes.

Les 29 et 30 novembre a eu lieu le congrès du Front National, l’occasion de réélire Marine Le Pen à la tête du parti (elle en était la seule candidate). Mais au-delà de cette élection principale, le comité central du FN était aussi choisi par les militants. Ce comité central – comparable au conseil national du PS ou de l’UMP– est le lieu d’expression des différentes sensibilités au sein du parti. Bien que le Front national ait toujours tenu à se montrer fédéré derrière une seule ligne politique commune, les choses semblent bouger. Et si on n’avouait qu’à demi-mot les désaccords entre certains membres du parti, l’élection du comité central les a confirmés. La conservatrice Marion Maréchal-Le Pen est arrivée en tête de ce scrutin, reléguant le républicain gaulliste assumé Florian Philippot à la quatrième place. Mais le vice-président du parti ne doit pas s’inquiéter. S’il n’est pas parvenu à convaincre les adhérents, c’est avant tout auprès des sympathisants qu’il trouve sa popularité. Une frange de l’électorat séduite par les discours antisystème et « anti-puissants » mais peu sensible aux discours sur l’immigration et l’identité nationale. C’est la raison pour laquelle son statut ne devrait pas changer au sein du parti.

« La cohésion entre les étoiles montantes du Front national est-elle vraiment durable ? » Crédit Photo : Eric Feferberg/AFP

« La cohésion entre les étoiles montantes du Front national est-elle vraiment durable ? » Crédit Photo : Eric Feferberg/AFP

Quelles conséquences au Front national ?

Marine Le Pen s’est acharnée à faire du Front national un parti comme les autres. Un parti qui ne fait plus peur, et auquel certains revendiquent librement l’adhésion. Un parti antisystème tout de même, comme aime le rappeler sa présidente. Mais un parti commun. Le problème, c’est que ce parti commun va être soumis à de nouveaux défis. Plus la popularité du FN sera grande et plus les enjeux seront importants. L’unité sera alors difficile à tenir. Il était jusqu’à maintenant facile pour le Front national de moquer les querelles internes à l’UMP et au PS. Mais le FN pourrait bien être à son tour soumis à ces dissensions. L’UMP et le PS fonctionnent avec des courants d’idées. Ces « partis dans le parti » sont soumis au vote des adhérents qui détermine l’importance de chaque tendance dans la ligne idéologique de la formation politique. Officiellement, au Front national, cela n’existe pas. On élit une personnalité, et non un courant de pensée. Mais dans les faits, on comprend vite que le choix de Marion Maréchal-Le Pen n’a politiquement pas la même valeur que celui de Florian Philippot. Ce qui pose la question de la mise en place au FN d’un procédé similaire à celui des partis dits traditionnels. Car si ces mouvements intra-parti poussent au débat et donc parfois aux dissensions, museler les idéologies –au nom de la cohésion– ne semble pas une solution très viable pour une formation qui souhaite accéder au pouvoir.

Emmanuel Durget