janvier 08

Étiquettes

Édito – Faut-il relayer la photo choc du Monde.fr ?

La rédaction de Buzzles est divisée. Ce jeudi 8 janvier, en plein traitement de l’affaire Charlie Hebdo, Le Monde.fr diffuse une photo de l’intérieur de la rédaction de l’hebdomadaire, après le massacre. Un couloir étroit jonché de feuilles tachées de sang, une flaque et des dessins en arrière-plan. Pas de corps. Doit-on la diffuser, la relayer, en citer seulement l’existence ?

Entre droit à l’information, respect de la dignité, information et émotion, le débat a opposé les membres de notre rédaction. A tel point que nous avons décidé de diffuser les arguments principaux afin que vous aussi, vous puissiez réfléchir et réagir. Plus que jamais n’hésitez pas à commenter. Nous sommes unis dans cette certitude : il n’existe pas une vérité.

Non, il ne faut pas relayer la photo du Monde.fr

Douze morts, onze blessés et vous n’imaginez toujours pas l’atrocité de l’attentat? Foutaise. Faut-il vraiment une photo qui montre le sol maculé de sang de la rédaction de Charlie Hebdo pour que vous preniez la mesure de la situation ?

Partout des réactions fusent et les gens restent choqués, effrayés par tant de violence. Une photo qui terrorise, comme sortie d’un film, à ceci près que sur Le Monde.fr le spectateur n’a pas le choix.

Elle n’informe pas

Une partie de la rédaction de Buzzles ne voit pas l’intérêt informatif de cette image, elle n’apporte rien mais sert au contraire la cause des terroristes. Ils prétendaient avoir « tué Charlie » et au-delà du symbole, notre liberté. Plus de trois millions de tweets #CharlieHebdo, 100 000 personnes rassemblées dans toute la France et surement plus par la pensée, sans oublier les journaux qui rendent hommage à Charlie Hebdo. Publier cette image c’est aller à l’encontre de ces mouvements qui ont démontré que l’attentat n’avait rien détruit, au contraire.

Nous ne prônons pas le sensationnel mais l’information. Pour cette raison nous n’imposons pas cette image, parce qu’il s’agit de la liberté de chacun de déterminer s’il a besoin de la voir.

• Oui, il faut relayer la photo du Monde.fr

Il est absolument nécessaire de publier l’image. Cette photo, au-delà de sa dimension émotionnelle, est vraiment informative. Cette photo appuie là où ça fait mal. À l’endroit même où Albert Londres appelait à mettre la plume dans la plaie.

Au fond, ce n’est pas l’image qui est choquante, c’est le massacre perpétré par ces barbares.

Et la photo permet précisément aux lecteurs-citoyens de prendre la juste mesure de ce qui s’est passé. Car on parle là d’un crime contre la République, contre un journal symbole de la liberté d’expression, elle même garante de la démocratie. Cette barbarie concerne chaque citoyen. Spontanément, l’Homme se protège de l’horreur. L’Homme n’est pas habitué à voir du sang. Et cette photographie est absolument nécessaire pour que le lecteur puisse rendre concret un acte qui était jusqu’à ce moment caché derrière un hashtag. Cette photo, c’est la vérité qui éclate au grand jour. Intérioriser l’événement, le percevoir, le matérialiser, le toucher est indispensable pour pouvoir le digérer.

Ajoutons que cette image ne porte atteinte ni à l’honneur ni à la mémoire des victimes. Au contraire, elle est dotée d’une dimension symbolique forte. Des feuilles, des dessins, des crayons, toute la matière première des victimes qui baigne dans des flaques de sang. Des journaux ensanglantés, c’est la démocratie qui saigne.

La rédaction