[FIPA] Démons, un film qui porte bien son nom

Adapté d’une pièce de théâtre du suédois Lars Norén (1984), le film Démons signé Marcial Di Fonzo Bo était présenté lors du FIPA 2015.

Marina Foïs, Romain Duris. Le casting est alléchant sur le papier. Sur le papier seulement. Dans les faits, les deux acteurs sont loin de leurs performances habituelles. Errant dans un décor alternant campagne profonde et manoir bourgeois, ils donnent l’impression de s’être trompés de registre.

A aucun moment, le film ne s’émancipe d’une mise en scène théâtrale, entre changements de décors injustifiés et sorties de scène absurdes.

Quatre personnages en tout et pour tout, les deux principaux sont accompagnés d’Anaïs Demoustier et Stéfan Konarske. Le quatuor incarne deux couples que tout oppose en apparence. Réunis le temps d’une soirée, ils exposent peu à peu leurs noirceurs refoulées. L’ambiance huis-clos ne fonctionne pas. Alors que l’alchimie des personnalités aurait dû être le point fort du film, chacun semble jouer dans son coin.

« Romain Duris et Marina Foïs, hélas. Crédit : DR »

« Romain Duris et Marina Foïs, hélas. Crédit : DR »

Adapter n’est pas gagné

Si les interactions manquent de crédibilité, c’est sans doute à cause des dialogues. Longs, absurdes et répétitifs, ils ressemblent à d’interminables monologues joués par interjections. L’explication est peut-être simple : en passant du théâtre scandinave au cinéma français, le texte a subi une traduction et une adaptation dans lesquelles tout sens a dû se diluer. L’écart culturel rend la compréhension difficile, peut-être trop.

Tout résulte de ce point : les décors semblent insensés et les attitudes surjouées, sans rapport évident avec les répliques. Les personnages, si torturés qu’ils en paraissent inhumains, indiffèrent au lieu d’interpeller. Il devient impossible de les prendre en pitié ou même de les haïr, on ne les comprend pas, on finit par les trouver tout simplement ridicules. Définitivement loin de nous…

Deux moments musicaux éclairent ce sombre tableau : un play-back déjanté de Romain Duris (I put a spell on you – Screamin Jay Hawkins) avec costume et moustache du dimanche ; et le générique de fin (Can our love – Tindersticks). C’est peu, et c’est dommage.

Las, on passe le film à attendre un élément perturbateur pour lancer l’intrigue. Le générique surprend le spectateur : aucun applaudissement ne retentit (chose rare au FIPA) et tout le monde est encore assis plusieurs minutes après la fin. Comme s’ils n’y croyaient pas, ou ne voulaient pas y croire.

Loïc Masson

Lucas Vola