[FIPA] Wolf Hall : La monarchie anglaise inspire encore

Changement d’époque : mercredi, le FIPA diffusait les deux premiers épisodes de la série Wolf Hall, inspirée du règne du célèbre Henry VIII, roi d’Angleterre et d’Irlande durant le XVIe siècle.

À la première vision, le script de Wolf Hall a de quoi rappeler d’autres œuvres plus ou moins récentes. Et deux comparaisons s’imposent.

The Tudors (2007) Michael Hirst

The Tudors compte quatre saisons, tournées entre 2007 et 2010 (photo D.R)

The Tudors compte quatre saisons, tournées entre 2007 et 2010 (photo D.R)

Walf Hall apparaît seulement cinq ans après la fin de The Tudors, série également consacrée au règne tumultueux d’Henry VIII. Un pan de l’Histoire connu et reconnu donc, qui a déjà fait l’objet de nombreuses adaptations cinématographiques. On pourrait alors craindre des redites, mais le réalisateur parvient à se détacher de l’histoire centrale pour se consacrer à un personnage jusqu’alors énigmatique : celui de Thomas Cromwell, homme d’origines populaires, qui parvient peu à peu à se hisser au sommet, jusqu’à devenir le plus proche conseiller du roi.

Contrairement à son prédécesseur, Peter Kosminsky fait du souverain un personnage secondaire, bien moins présent et intrépide. Autre différence : dès le premier épisode, Thomas Wosley, l’ancien Cardinal ne fait plus partie de la Cour. Il apparaît faible, misérable, bien loin de l’homme magouilleur, presque machiavélique représenté dans The Tudors lorsqu’il est encore au pouvoir.

Et ce sont bien ces petites dissimilitudes qui font de Wolf Hall une série à part entière en lui confèrant une vraie originalité.

Barry Lyndon (1975) Stanley Kubrick

La série Barry Lyndon est l'adaptation du roman de William Makepeace Thackeray, Mémoires de Barry Lyndon (photo DR)

La série Barry Lyndon est l’adaptation du roman de William Makepeace Thackeray, Mémoires de Barry Lyndon (photo DR)

La série de Peter Kosminsky présente par ailleurs bien des similitudes avec la fresque historique de Stanley Kubrick. Sur le fond certes, mais avant tout sur la forme.

L’histoire n’est pas nouvelle : un homme rusé issu du peuple dans une Angleterre monarchique (XVIe siècle pour Wolf Hall, XVIIIe pour Lyndon) appelé à s’élever puis, sans doute, à chuter lourdement. Le souci de décrire une société à une époque précise est un autre point commun, tout autant que la narration très lente et détaillée qui l’accompagne.

C’est sur la forme cependant que la comparaison prend tout son sens. Dès les premières images, Wolf Hall surprend par son esthétique façon peinture renaissance, à grand renfort de bougies et de décors monochromes. Le héros, tout de gris vêtu, porte sur lui cette sobriété esthétique, ce souci de coller à une période identifiée. Une patte visuelle qui rappelle celle de Barry Lyndon, célèbre pour avoir été tourné sans l’aide de lumière artificielle.

Comme Barry Lyndon, Wolf Hall est taillé pour être une longue saga alternant temps faibles elliptiques et points de tensions (à chaque début et fin d’épisode). Le film de Kubrick dure trois heures, le défi de Wolf Hall sera de conserver ce rythme sur au moins le triple.

Autre point commun entre les deux œuvres : son positionnement à contre-courant vis-à-vis des standards de son époque. Mark Rylance, l’acteur principal de Wolf Hall, alterne avec brio les traits d’un personnage aussi attachant qu’inquiétant, aussi cruel qu’empli d’empathie. Peu de rebondissements incessants, peu de violence, pas de sexe. Bien peu de repères pour un consommateur moyen de séries en 2015.

C’était aussi le cas en 1975. Depuis, le film est devenu chef d’œuvre.

Une interprétation au rendez-vous

Même si ce début de saison souffre de certaines longueurs, il faut tout de même saluer la prestation de Mark Rylance. Il dégage une authenticité et une sorte de naïveté qui, pour le moment, convient parfaitement à son personnage, tiraillé entre décès, enfance traumatisante et découverte du cercle rapproché du roi. Au rayon des visages célèbres, Damian Lewis (Homeland) et Jonathan Pryce (Pirates des Caraïbes) signent de belles performances dans les rôles secondaires du roi Henry VIII et du Cardinal.

Seul petit bémol du casting : le choix de l’actrice pour le rôle d’Anne Boleyn. Si Claire Foy incarne bien cette femme calculatrice et capricieuse, l’amante de Sa Majesté est censée venir tout droit de France. Les étrangers n’y verront que du feu, mais impossible pour nous de se laisser berner par une comédienne britannique. Lorsqu’elle prononce quelques mots en français, forcément, ses tonalités anglaises ressortent. Le plus problématique est sûrement quand elle tente d’imiter l’accent français alors qu’elle parle dans sa langue d’origine, pour plus de crédibilité. « Mister Cromwell » se transforme alors en « Mister Cromél ». Un peu exagéré tout de même !

Manon Bazerque 

Loïc Masson