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Snapchat Discover : conquis ou déçus ?
Depuis son arrivée sur le marché des applications mobiles, la version portail d’information de Snapchat, appelée Discover, ne fait pas l’unanimité. Le concept de cette application de messagerie éphémère, utilisée pour envoyer des photos, mérite pourtant que les professionnels de l’information et de la communication se penchent sur cette nouvelle manière d’informer.
« Snapchat Discover, c’est quasiment un retour aux sources ! » Selon Christophe Lachnitt, directeur de la communication du groupe DCNS, la nouveauté proposée par l’application de messagerie éphémère fait revivre des caractéristiques propres aux médias traditionnels. Pour rappel, Discover est le portail d’information créé par l’application Snapchat, conçue au départ pour l’échange de photos éphémères entre usagers.
Le changement de Discover se situe du côté des stories, initialement élaborées par les utilisateurs pour reconstruire l’évolution de leur journée. Les stories apparaissent comme un nouveau support de partage de contenus pour une poignée de médias partenaires – américains, puisqu’il n’existe aujourd’hui aucune autre version (douze médias sont présents sur Discover, comme CNN, MTV, Cosmopolitan ou encore National Geographic ou Vice). Comme pour tous les autres utilisateurs, les stories de ces médias sont disponibles vingt-quatre heures.
Discover, le format d’un journal papier
Sur Discover, les médias n’ont pas besoin de faire la promotion de leur production. « Les journalistes conçoivent leur contenu, le hiérarchisent à leur manière et le diffusent sur Discover, rappelle Christophe Lachnitt. Il n’y a pas de démarche sociale de la part des médias pour attirer le public. Ils le séduisent par les contenus qui leur sont présentés dans une démarche journalistique classique. » De ce point de vue, Discover se différencie de Facebook, par exemple, car ce dernier filtre les contenus grâce à un algorithme adapté à chaque utilisateur. Sur Discover, l’utilisateur choisit sa lecture du jour dans le sommaire proposé par le média.

L’application Snapchat Discover présente le contenu des médias partenaires à la manière d’un sommaire de journal. (crédit photo : S.Shojaei)
L’application permet également à ces médias de toucher une audience plus jeune. Car parmi les 82 millions d’utilisateurs actifs de Snapchat, 71% ont moins de 25 ans. « Toutes les productions diffusées sur Discover ne sont pas de qualité, précise Gilles Bruno, rédacteur en chef du blog L’Observatoire des Médias. Mais c’est le même problème partout. Et tout ce qui peut amener les jeunes à s’informer est positif. » Pour Alexia Ducos, doctorante en sciences de l’information et de la communication au Laboratoire d’études et de recherches appliquées en sciences sociales (LERASS) de Toulouse, « L’idée de Discover apparaît comme une stratégie pour répondre à la situation de crise que connaissent les médias aujourd’hui. »
Une formule qui ne plaît pas à tout le monde
« Je ne comprends pas l’intérêt que l’on peut trouver au concept de Discover dans une application photo telle que Snapchat », admet Chloé Marriault, étudiante à l’IUT Journalisme de Tours. Et Chloé n’est pas la seule à douter de la pertinence de l’application. Chez les journalistes également, on s’interroge sur la qualité du contenu proposé, comme le prouve ce billet diffusé le 26 février dans l’émission L’Atelier des Médias, sur RFI.
« Discover me fait penser à la presse people, ajoute Alexia Ducos. On consomme et on jette. Ce qui correspond assez bien au concept initial de Snapchat. » Serait-ce cet aspect-là que les détracteurs de Discover déplorent ? Il est encore tôt pour tirer des conclusions des premières observations. En attendant, « évitons les réactions épidermiques et les a priori sur l’application, recommande Gilles Bruno. Le journalisme est de toute façon destiné à se compliquer, notamment avec de nouvelles formules comme celle de Discover. Les journalistes doivent se former pour cela. Qui sait ? Un jour, peut-être, Libé adaptera ses contenus pour la version française de Discover. » Et pourquoi pas ?
Suzanne Shojaei