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Ce n’est pas un péplum, ce sont des Roms
Mardi 24 mars, les étudiants du projet tutoré Bobine & Clap de l’IUT de Sophia-Antipolis et l’Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion organisaient une projection de Spartacus & Cassandra à la MJC Picaud de Cannes. Engagé, ce documentaire nous plonge dans le quotidien de deux enfants roms.

La salle de cinéma de la MJC Picaud était pleine lors de la diffusion de Spartacus et Cassandra. Crédit Photo : Lhadi Messaouden
« A 1 an, je marchais… A 3 ans, mon père était en prison… A 4 ans, je faisais la manche avec ma sœur… A 7 ans, je suis arrivé en France… ». Cette voix qui résonne au début du documentaire est celle de Spartacus. Avec sa jeune sœur Cassandra, ces deux enfants roms ont trouvé asile auprès de Camille, une jeune trapéziste qui s’improvise éducatrice. Tous les trois habitent ensemble dans ce qu’ils appellent le « Cirque ». Ce chapiteau, situé à Saint-Denis, est leur échappatoire. Le seul moyen pour eux de ne pas vivre dans la rue.
Bande annonce de Spartacus et Cassandra, en salle depuis le 11 février 2015
La vie ou la famille ?
Mais cette chance ils ne peuvent la partager avec leurs parents qui sont obligés de dormir sur le trottoir. Cette séparation place les deux enfants face à un dilemme. Doivent-ils sacrifier leur enfance pour rester avec leurs parents ? Ou les abandonner afin d’assurer leur avenir ? Entre un père dépressif et alcoolique qui rêve d’aller en Espagne et une mère également instable, le choix semble être évident. Mais nous sommes dans la vraie vie. Pas dans un film. Et dans la vraie vie, l’évidence n’a pas sa place.
Les liens du sang sont forts. Ils peuvent même être toxiques. S’en débarrasser n’est pas une chose aisée. Tout au long du film, cette famille va se séparer, se déchirer. Spartacus et Cassandra vont prendre conscience que le paradis est à portée de main. Mais pour l’atteindre, ils vont devoir abandonner leurs parents en enfer. Pour obtenir quelque chose, il faut en abandonner une autre de même valeur. Ce principe de l’échange équivalent, Spartacus et Cassandra l’ont accepté. Désormais, c’est dans la sérénité qu’ils vivent avec Camille.

L’équipe de Bobine & Clap en compagnie de l’ingénieur son du film, Maissoun Zeineddine (3ème en partant de la gauche), et de Karin Ramette (4ème en partant de la gauche) de l’ACID. Crédit Photo : Lhadi Messaouden
Une œuvre intime
Trop souvent présentés à travers le prisme des clichés et des stéréotypes, les Roms sont ici montrés sous un autre angle. Cela est dû au travail et au talent d’un cinéaste qui s’est investi corps et âme dans son œuvre. Ioanis Nuguet n’a pas uniquement tourné son film, il l’a vécu. Il a côtoyé plusieurs années les populations roms de Saint-Denis. Un beau jour, un jeune garçon vient le voir avec une demande particulière : il veut qu’on réalise un film sur lui et sa petite sœur. Vous l’avez compris, ce garçon c’était Spartacus. Ioanis Nuguet a accepté la proposition et a donné la parole à Spartacus et Cassandra.
Pendant un an, le réalisateur a suivi caméra à l’épaule la vie des deux enfants et celle de Camille. Toujours en mouvement et à l’affût, le film est parfois d’un réalisme saisissant. L’impression de vivre dans les yeux de Spartacus et Cassandra est très forte. Le spectateur est plongé dans des vagues successives de sentiments contrastés. Ioanis Nuguet, en raison de sa capacité à faire oublier sa présence auprès des acteurs, est parvenu à capter des moments de vie très intimes sans tomber dans le voyeurisme. Le tout est d’une telle singularité que l’on en sort bouleversé. Ce sentiment prend une tout autre ampleur lorsqu’on apprend que Ioanis Nuguet vit désormais avec Camille et les deux enfants. Finalement, Spartacus et Cassandra n’est pas un documentaire. C’est un conte de fée.
Interview de Maissoun Zeineddine, l’ingénieur son de Spartacus et Cassandra, présente lors de la projection du film à la MJC Picaud.
Peut-on dire que Spartacus et Cassandra est un film sur les roms ?
Sur certains aspects le film ressemble un reportage. Qu’en pensez-vous ?
Spartacus et Cassandra est très fort sur le plan émotionnel. Est-ce que cela a été une difficulté pour vous lors du tournage ?
Lhadi Messaouden