MLS : un championnat taillé pour briller #1/2

Peu connue il y a quelques années, la « Major League Soccer » (ligue de football nord-américaine) est considérée comme le challenge ultime de ceux qui ont bâti la légende de ce sport. Un championnat au fonctionnement atypique qui est aujourd’hui en plein essor.

Le crépuscule d’une carrière n’est jamais chose facile pour un footballeur. Qui plus est, quand on a passé plus d’une décennie dans les grands championnats européens et que les plus prestigieux trophées se juxtaposent dans le palmarès. Les perspectives sont multiples. Certains partiront à la retraite sans avoir quitté le vieux continent. C’est le cas de notre Zizou national qui a fait de la finale de la Coupe du monde 2006, sa dernière partition avec une sublime « panenka » sur Gian Luigi Buffon (c’est certes un compte rendu partiel du match mais la suite n’est pas importante). D’autres joueurs se laisseront bercer par le calme des tribunes désertes dans les Emirats arabes unis ou goûteront à l’exotisme des championnats australien et indien.

Mais depuis une décennie, la Major League Soccer s’impose comme le théâtre de la dernière épopée des grands noms du foot. En mars 2007, l’international anglais et joueur du Real Madrid David Beckham est la première superstar à traverser l’atlantique pour rejoindre la franchise des Los Angeles Galaxy.

Trois ans plus tard, Thierry Henry décidera de ponctuer sa carrière par un dernier challenge au New York Red Bulls. Le monde découvre la MLS, le championnat grandit, et les cadors (préretraités) des grands clubs européens affluent. Kaka, Gerrard, Pirlo, Lampard, Villa, Drogba, une pluie d’étoiles s’abat sur les Etats-Unis.

stars mls

Autrefois face à face en Europe, c’est désormais sur le continent américain que ces grands footballeurs seront opposés. (Crédit photo : http://www.carbonated.tv)

Mais l’attrait des grands joueurs pour la ligue de football nord américaine n’est pas un phénomène récent. L’ancêtre de la MLS, la NASL (North American Soccer League), créée en 1968 comptait dans ses rangs les Pelé, Beckenbauer, Cruyff, Müller ou encore Eusebio. Des joueurs recrutés à prix d’or dans un championnat qui se singularise par sa démesure. Une démesure responsable de la faillite de la NASL en 1984. Plus de 30 ans après, beaucoup de points communs relient la NASL à son successeur. Mais d’un point de vue économique, la MLS semble avoir bien assimilé la leçon.

Un fonctionnement singulier

La MLS, ce sont 20 franchises séparées en deux conférences, l’Est et l’Ouest. 18 équipes américaines auxquelles il faut rajouter deux formations canadiennes : les Vancouver Whitecaps ainsi que le Montreal Impact. Ici, on commence en mars et il n’y a pas 38 journées, mais des « playoffs » à partir du mois d’octobre. On est aux Etats-Unis s’il vous plaît ! Les six premières équipes de chaque conférence se qualifient pour les séries éliminatoires. Le vainqueur de la conférence est affronte ensuite celui de l’ouest, pour se disputer le trône du football américain.

La MLS, c’est aussi un fonctionnement économique atypique. Ici, la ligue est propriétaire du contrat des joueurs, et non les clubs. Chaque équipe se voit attribuer une masse salariale équivalente à partager entre les athlètes. Ce « salary cap » s’élevait à 3 100 000 $ en 2014 (2 769 230 €). Dans ce championnat, le salaire moyen est de 20 875 euros par mois. Un montant aux antipodes des grands championnats européens. Finalement, le « championnat de la démesure » porte assez mal son nom.

Comparaison salaire championnats européens

La MLS est reléguée très loin derrière les championnats européens au niveau du salaire mensuel moyen. Même au Mexique, un joueur gagne en moyenne 13 000 € de plus par mois que son voisin américain. Crédit : Sacha Zylinski. Sources : Eco.foot.fr

Mais depuis 2007, une loi vient bouleverser cet encadrement ferme de la masse salariale. Lors de l’arrivée de David Beckham aux Los Angeles Galaxy, les dirigeants de la MLS mettent en place la règle des trois joueurs désignés. Chaque club peut recruter jusqu’à trois joueurs qui ne sont pas soumis à la rigueur de la masse salariale. Là encore, toutes les précautions sont prises pour limiter l’endettement des franchises. La MLS contribue au paiement d’une partie de la rémunération selon une grille variable en fonction de l’âge du joueur : 150 000 $ (134 061 €) aux joueurs de moins de 18 ans, 200 000 $ (178 748 €) pour les joueurs entre 18 et 23 ans et 335 000$ (299 429 €) si le joueur a plus de 23 ans. Le reste du salaire est pris en charge par la franchise.

Lorsque la loi est acceptée en 2007, la volonté de la MLS est claire : faire du championnat américain un nouvel eldorado pour les grands joueurs européens généralement au crépuscule de leur carrière. La recette fonctionne. Le championnat s’internationalise. Seulement, la mise en place des joueurs désignés a créé d’énormes disparités dans la masse salariale des différentes franchises américaines. En 2014, l’équipe de Toronto possédait une masse salariale plus de cinq fois supérieure à celle des Chivas USA, club de la banlieue de Los Angeles, disparu à l’issue de la saison passée.

Mais ces disparités salariales s’observent également à l’intérieur même des franchises. Les joueurs n’étant pas désignés perçoivent des salaires très nettement inférieurs à ceux des trois meilleurs joueurs. Des écarts qui peuvent parfois être poussés à leur paroxysme.

Inégalités salariales MLS

L’inégale répartition dans la masse salariale des 5 équipes les plus riches de la MLS. Crédit : Sacha Zylinski. Source : http://www.mlsplayers.org

Dans l’équipe du New York City FC , le trio phare Lampard-Villa-Pirlo se partage 90 % de la masse salariale de l’équipe. C’est à dire que la trentaine d’autres joueurs ayant un contrat professionnel se partage seulement les 10 % restants. Comme quoi, même dans le foot, les inégalités sociales peuvent être surprenantes !

D’ailleurs, plusieurs acteurs de la MLS souhaitent remettre en cause cette politique salariale. Des syndicats de joueurs indiquent que la coexistence du « salary cap » et du système de joueurs désignés est synonyme de disparité salariale nocive pour une équipe. David Beckham, le premier joueur désigné de lhistoire du championnat, est un fervent défenseur de la disparition du salary cap afin de favoriser le recrutement de grands joueurs mondiaux et d’accélérer l’exportation de la MLS outre-atlantique. Une réforme qui provoquerait également une hausse plus importante des droits TV ainsi qu’un accroissement des revenus de sponsoring et de billetterie.

Retrouver la deuxième partie ici :
http://atomic-temporary-41098618.wpcomstaging.com/2015/10/03/mls-un-championnat-taille-pour-briller-22/

Sacha Zylinski