Stephan Eicher : l’homme aux automates

Jeudi 11 février, le Palais des festivals accueillait l’un des plus célèbres chanteurs suisses, Stephan Eicher. Il a présenté son nouveau spectacle hors du commun : « Stephan Eicher und die Automaten ».

Stephan Eicher lors de son spectacle à Cannes (crédit photo : Laure Le Fur)

Stephan Eicher lors de son spectacle à Cannes (Crédit photo : Laure Le Fur)

Il est 20h20. Le théâtre Debussy finit de se remplir. Tout le monde semble impatient, il parait que le spectacle n’est pas ordinaire. L’originalité c’est un peu la marque de fabrique de Stephan Eicher. A son adolescence, le chanteur avait formé avec son frère le groupe Grauzone. Leur musique se tournait vers l’électro-industriel, un son plutôt avant-gardiste dans les années 80. Pendant toute sa carrière, il a aussi privilégié des instruments peu connus du public comme le balum et le cromorne, instruments qu’il a utilisés pour l’album Engelberg.

20h35. Les lumières de la salle s’éteignent peu à peu. Dans l’obscurité, une silhouette semble se dégager du milieu de la scène. Un projecteur s’allume, illuminant Stephan Eicher, guitare à la main. Le chanteur commence par deux nouvelles chansons de son répertoire. Les sons de guitare donnent une ambiance apaisante à la salle. Puis les premiers applaudissements viennent briser cette atmosphère cosy. Eicher prend la parole, son accent suisse/allemand trahit son origine : « Je sais que vous n’êtes pas venus uniquement pour mes nouvelles chansons et je vous comprends. Je vais tenter de jouer une très ancienne chanson et je vais essayer de me laisser accompagner par ces automates ». Suite à ces mots, les premières notes de guitare laissent deviner Two people in a room, chanson qui l’a rendu célèbre en 1984. Tout doucement la magie s’installe. Les instruments entrent en action un par un tout en illuminant la scène progressivement. Le xylophone commence à jouer tout seul au rythme de la guitare. C’est ensuite au tour de la batterie dont les baguettes s’illuminent à chaque coup de tambour. Puis les touches du piano s’actionnent sans l’aide d’un pianiste, puis c’est autour de l’accordéon, lui aussi automatisé. A la fin de la chanson, toute la scène est éclairée et tous les instruments jouent en même temps.

Tous les instruments automatisés de Stephan Eicher de gauche à droite : le telsa coil, l’orgue, les xylophones, le piano, la batterie ou encore l’accordéon (Crédit photo : Laure Le Fur)

Tous les instruments automatisés de Stephan Eicher de gauche à droite : le telsa coil, l’orgue, les xylophones, le piano, la batterie ou encore l’accordéon (Crédit photo : Laure Le Fur)

Mystère autour des automates
Entre deux chansons, l’artiste demande un thé pour apaiser sa gorge. Pour faire passer le temps, il propose de répondre à des questions. Une femme s’interroge : « Comment ça marche ? ». Bien sûr, dans la salle tout le monde veut comprendre. Eicher commence à nous expliquer : « Vous voyez ce piano ? Il peut se transformer en orgue (…) et  je peux jouer du telsa coil à travers ma guitare ». Le chanteur s’éloigne ensuite du sujet et part dans de grandes discussions. Quand son thé arrive, on réalise qu’il a tourné autour de la question sans y répondre… trop tard pour le relancer, le concert recommence.

Les chansons se suivent et la magie reste toujours la même. Les sons et les lumières s’enchaînent et se complètent. On se sent comme un enfant émerveillé à chaque instant. Chaque chanson est comme un combat, l’homme et les automates s’affrontent, le tout est de savoir qui sera plus fort que l’autre. Au fur et à mesure du concert, on oublie presque que le chanteur est non pas accompagné de musiciens mais d’automates. Ce n’est qu’à la fin du spectacle que Eicher nous ramène à la réalité : « Mesdames et Messieurs,  à la batterie… la batterie ».

Ce soir, c’est standing ovation. Le chanteur salue le public et disparaît en coulisse. Les fans ne veulent pas que cela s’arrête : les applaudissements ne cessent pas et les cris du prénom du chanteur se font entendre aux quatre coins de la salle. Eicher est obligé de revenir et chante une dernière chanson, Des hauts, des bas. Une fois fini, l’artiste se lève, fait un dernier remerciement de la main à son public et part vers les rideaux sans se retourner.

A la fin du concert, nous avons voulu comprendre le fonctionnement de ces automates. La salle se vidant, les régisseurs désinstallent les machines. « Pouvez-vous nous expliquer comment cela marche? ». Chacun hésite à venir nous répondre. Au final, un homme s’approche et nous dit « Le fonctionnement de ces machines fait partie de la magie de ce spectacle. Tout ce que je peux vous dire c’est que c’est agréable de travailler sur une tournée comme celle-là ». Après une tentative échouée d’approcher Stephan Eicher, nous quittons la salle. Ce soir c’est incontestable, l’homme l’a emporté sur les automates.

Trailer 2 « Stephan Eicher und die Automaten » :

Kimberley Mangin

Thomas Woloch

Laure Le Fur