
Étiquettes
Une nuit haut perchée
C’est sûrement la plus grande surprise des Jeux olympiques de Rio 2016. Renaud Lavillenie, recordman du monde, à qui on promettait un second titre olympique, tombe de son nuage. C’est finalement le Brésilien Thiago Braz, inconnu du grand public, qui décroche une médaille d’or. Retour sur une onde de choc sportive.
Comment expliquer l’inexplicable ? C’est sur les ondes d’Europe 1 que réagit l’ancien entraîneur de l’équipe de France d’athlétisme, Jean-Claude Perrin, à la médaille d’argent de Renaud Lavillenie.
Le roi Renaud est tombé de son trône. Lui qu’on croyait intouchable, lui qu’on croyait imbattable. Lui, l’héritier de l’illustre Serguei Bubka, a échoué. Par échec, ne parlons pas d’un insuccès ou encore moins d’une défaite, mais plutôt d’un manque de réussite.
Qui aurait pu penser que Thiago Braz Da Silva, jeune inconnu, puisse ravir le titre de champion olympique à Renaud Lavillenie ? Avant le concours fatidique de ces jeux, tous les regards se tournaient en effet vers le Canadien Shawnacy Barber. Mais après avoir échoué à 5.65 mètres, ses rêves de pouvoir surpasser le français se sont définitivement effacés.
Tous les voyants étaient donc au vert pour le Clermontois de 29 ans. Mais c’était sans compter d’autres éléments extérieurs. La pluie, tout d’abord, qui a retardé le concours, puis la longue période d’attente entre divers sauts, qui peuvent être des facteurs capables de déstabiliser tout perchiste. Et puis, il y a la foule. Le public brésilien s’est toujours avéré être passionné et fier de ses athlètes. Pendant le concours, Thiago Braz impressionne et les Brésiliens sont de plus en plus nombreux à huer les athlètes qui pourraient être une menace pour leur nouveau chouchou. Esprit de l’olympisme, où te caches-tu ?

Thiago Braz est celui qui aura fait tomber Renaud Lavillenie de ses 6.03 mètres (Crédit : Reuters)
Renaud Lavillenie échoue et Thiago Braz crée la sensation des Jeux olympiques. Il passe 6.03 mètres, et explose son record personnel de 10 centimètres. Et c’est ici qu’un tournant se prend. Renaud, pour conserver son titre, fait l’impasse pour passer 6.08 mètres. Il ne lui reste qu’une tentative et le voilà copieusement hué par le public brésilien. Dans cette situation, le sportif est déstabilisé et toute la pression que Braz avait sur ses épaules s’est peut-être transposée sur Renaud Lavillenie. Avant ce saut, on le voit commettre un geste d’énervement. Un pouce baissé en direction du public. Il s’élance, malheureusement, la barre tombe. Il ne sera pas champion olympique.

Après avoir échoué décrocher ce titre olympique qu’il voulait tant, il ne lui reste que le drapeau français. (Crédit : AP)
L’argent ne fait pas son bonheur
« J’ai juste une énorme déception et frustration de cette ambiance de merde », lâche Renaud au micro d’Europe 1. Ce n’est un secret pour personne. Dans la famille Lavillenie, ils sont tous compétiteurs. Le petit-frère, Valentin, est tout comme Renaud. Et les déclarations chocs de ce dernier après sa médaille ont fleuri dans la presse française. Les médias brésiliens sont, eux, plus critiques : Lavillenie se compare à Jesse Owens et cite les fans déplorables de football. Le français a souffert de la pression de la foule dans la dernière ligne droite de la compétition », titre Globo Esporte. O Globo diabolise le français dans un de ses articles. Il écrit notamment que « le médaillé d’argent français ne parle plus à Thiago Braz depuis un an ».

Lavillenie échoue une nouvelle fois. Il n’y aura pas de second titre olympique consécutif pour le Clermontois. (Crédit : AFP)
Être deuxième aux Jeux olympiques serait un accomplissement pour tout athlète, mais Renaud rêvait d’or. Et, on ose imaginer qu’il n’est pas satisfait de ce résultat. Alors que Thiago Braz était porté en triomphe par son public, c’est un Renaud Lavillenie triste que l’on a vu serrer fort dans ses bras Philippe d’Encausse et sa compagne, Anaïs Poumarat. Cette dernière racontait à L’Équipe, il y a quelques jours, que « la compète, s’il commence à perdre, je ne suis pas sûre que ça l’amuse très longtemps ».

Philippe d’Encausse, son entraîneur, et sa compagne, Anaïs Poumarat, apportent leur soutien à l’athlète français.
Si, au début de ces Jeux olympiques, la sélection française était considérée comme proche du suicide collectif avec un compteur de médailles vierge, la performance de Lavillenie rapporte une médaille d’argent de plus à la délégation. Et même si le Clermontois est déçu de sa performance, son esprit de compétition et sa combativité reflètent ce que de nombreux passionnés de sports veulent voir : des histoires magnifiques, quelquefois tragiques, mais ô combien inspirantes jusqu’à en devenir mythiques. Oui, on se souviendra longtemps de cette nuit olympique…
Thomas Woloch