Dar al-islam et Dabiq, la propagande selon Daesh

Dabiq et Dar al-islam sont les journaux officiels de l’État islamique. A destination de l’Occident, ils représentent un véritable instrument de propagande et de terreur.

Dar al-islam signifie la maison de l’islam en arabe. C’est aussi une locution utilisée pour désigner les parties du monde où les lois islamiques gouvernent. C’est dans cette idéologie maximaliste qu’est fondé par Daesh le magazine éponyme. Publié en décembre 2014, le premier numéro annonçait la couleur. Intitulé « L’État islamique étend son territoire », ce numéro était un éloge de la hijra, c’est à dire l’émigration vers « le califat ». Ainsi, l’objectif premier de Daesh à travers ce journal est de recruter en Occident. « L’objectif principal de ces magazines, c’est le recrutement. Ils ciblent les pays les plus stratégiques à l’international : les pays francophones (France, Belgique, pays d’Afrique), la Russie, la Turquie », explique l’expert en communication Mathieu Slama. Étant à destination d’un public français, Dar al-islam reprend tous les codes de la presse française. On retrouve ainsi des éditos, des reportages, ou encore des interviews. On trouve ainsi des articles comme « Attaquer ceux qui insultent le Prophète », « L‘histoire de l‘inimitié de la France envers l‘Islam », ou encore « Le salut par l‘allégeance et l‘épée ». Le ton est extrêmement offensif et les images de cadavres sont nombreuses.

Le magazine se veut un outil de terreur pour ceux considérés comme mécréants mais aussi un outil de recrutement et de persuasion. Citant de nombreuses fois des hadits et des versets du coran, Dar al-islam facilite aussi le jeu de l’extrême droite en France, en favorisant l’amalgame entre islam et violence. Cette technique s’inscrit totalement dans la stratégie de Daesh afin de mieux diviser l’Occident. Dans la dernière page du numéro 2, est présenté le verset 5 de la sourate 9. « Après que les mois sacrés expirent, tuez les associateurs où que vous les trouviez. Capturez-les, assiégez-les et guettez-les dans toute embuscade. Si ensuite ils se repentent, accomplissent la Salat et acquittent la Zakat, alors laissez-leur la voie libre, car Allah est Pardonneur et Miséricordieux. ». Ainsi comme dans le discours habituel de Daesh, on retrouve une manipulation de la religion pour instaurer la peur. Le magazine avait notamment fait parler de lui en France après les attentats de Paris. En une du numéro 2 était écrit « Qu’Allah maudisse la France » en lettres blanches sur la Tour-Eiffel. Les propos sont très violents envers les Français. Par exemple, sur l’image d’un rassemblement en hommage aux victimes des attentats de Paris est écrit en légende : « {Allâh rassemblera, certes, les hypocrites et les mécréants, tous, dans l’Enfer.} [S. 4 v. 140] ».

couverture Dar al-islam

Couverture du numéro 2 de Dar al-islam avec en Une un soldat face à la Tour-Eiffel. Crédits : Dar al-islam

 

« La France à genoux »

Aux côtés de Dar al-islam, on retrouve également le journal Dabiq. Le journal porte son nom en référence à la ville éponyme au nord de la Syrie. Selon l’eschatologie islamique, c’est dans cette ville que les armées de l’islam affronteront les forces anti-islamiques lors de l’apocalypse. Pilier de la propagande de l’EI, Dabiq est à la fois plus épais et plus dense que Dar al-islam. Le second journal comprend beaucoup de traductions d’articles de Dabiq. L’importance de ces magazines dans le milieu radicalisé est primordiale. Le journaliste à RFI David Thomson aborde la légitimité de Dabiq et Dar al-islam : « Tous les djihadistes pro-EI les lisent. C’est l’une des voix officielles de l’EI. Tout ce qui est écrit a été validé par la haute hiérarchie. Ce n’est pas juste le fait d’une poignée de petits combattants libres d’écrire ce qu’ils veulent. C’est pensé, réfléchi et validé par les grands émirs de l’EI ».  Selon le journaliste, les auteurs de Dar-al-Islam sont « un groupe de Français basés en Syrie, qui anime la branche française d’Al Hayat ». Quant à Dabiq, on peut penser au journaliste britannique John Cantlie, pris en otage par Daesh et toujours retenu par l’État islamique. Prisonnier depuis novembre 2012, il a écrit plusieurs articles dans Dabiq.

John Cantlie

John Cantlie en train de corriger les articles de Dabiq. Crédits : Slate

 

Dabiq et Dar al-islam ne sont évidemment pas les seuls outils de propagande. En termes de magazines, Konstantiniyye (Constantinople) est destiné à un public turc et Rumiyah (Rome) est traduit en arabe, anglais, allemand, français, indonésien et turc. Toute la communication de Daesh à l’étranger est gérée par al-Hayat Media, une branche de communication spécialisée dans la traduction de la propagande à destination des combattants ou des sympathisants de Daesh à l’étranger. Cette propagande extrêmement directe et frontalement agressive est la démonstration de l’idéologie de terreur mise en place par l’Etat auto-proclamé.

Roberto Garçon