« Paris 2024 fera évoluer les mentalités »

Marie-Amélie Le Fur, triple championne paralympique, est très impliquée dans la candidature parisienne pour les Jeux 2024. L’ancienne co-présidente du comité des athlètes dévoile ses ambitions pour les paralympiques 2024.

Tony Estanguet, président du comité d’organisation des Jeux olympiques Paris 2024, souhaitait mettre l’accent sur l’organisation des Jeux paralympiques. On ne peut pas affirmer la déclaration dès maintenant. Mais du côté des athlètes handisport, les signaux sont au vert.

Marie-Amélie Le Fur, représentante des athlètes paralympiques au comité des athlètes, l’affirme. Paris 2024 est l’occasion de mettre en valeur le handicap grâce à une compétition exceptionnelle. « L’intérêt, c’est de favoriser la prise de conscience sur la population. C’est de donner l’envie d’une pratique de loisirs comme les personnes valides peuvent en faire. »

Pendant deux semaines, les athlètes paralympiques représenteront leurs délégations nationales pour une belle promotion des handisports. « Accueillir la plus belle compétition sportive au monde dans son pays, quand on l’a vécu, c’est quelque chose de fort, particulier, un partage immense avec le public. »

Marie-Amélie Le Fur n’est pas novice en la matière. Triple médaillée d’or aux Jeux paralympiques en athlétisme (1 à Londres 2012, 2 à Rio 2016), la détentrice du record du monde du saut en longueur en catégorie T44 (amputation des membres inférieurs) connaît les valeurs que procure cette compétition. « Les Jeux paralympiques arrivent à véhiculer des messages : le fair-play, le vivre-ensemble. C’est des valeurs qu’on a besoin de retrouver, notamment chez la jeunesse. »

La génération Paris 2024

La jeunesse, c’est l’enjeu fondamental pour Marie-Amélie Le Fur. A 29 ans, la future maman sait qu’impliquer des mineurs dans l’organisation des Jeux est quelque chose d’important dans la promotion de l’événement. « On va pouvoir éduquer les plus jeunes. Ça commence dès maintenant dans les écoles jusqu’en 2024 et malgré leur handicap, on va pouvoir leur montrer toutes les possibilités qu’ils ont. »

Le comité d’organisation des Jeux olympiques a désormais sept ans pour préparer des campagnes de sensibilisation auprès des jeunes en situation de handicap. « Il faut leur montrer qu’à travers la pratique du sport, on peut repousser ses limites. La compétition à domicile va augmenter la pression sur nos jeunes et les motiver. »

Projet athlétique

Une motivation qui demeure inconnue pour les futurs athlètes de la délégation française. Car oui, ce sera la première fois que Paris organisera les Jeux paralympiques, l’événement n’existant pas lors de la dernière célébration des JO à Paris en 1924. Marie-Amélie Le Fur, 35 ans en 2024, ne sait pas encore si elle tentera d’accroître son palmarès paralympique. Mais accueillir les Jeux olympiques et paralympiques dans son pays pourrait inciter certains athlètes à repousser leur carrière. « 4 ans de compétition supplémentaires ne sont rien à côté de la motivation et de l’émotion que ça va procurer. » Teddy Riner, ancien collègue de la Vendômoise au comité des athlètes, avait par exemple déclaré qu’il terminerait sa carrière en 2024 si Paris devenait la ville-hôte.

Le comité de candidature Paris 2024 présidé par Tony Estanguet, membre du Comité International Olympique, Anne Hidalgo, mairesse de Paris, et Bernard Lapasset, président de la Fédération Internationale de rugby, avait demandé aux athlètes français de devenir acteurs de l’organisation. « Le but c’est d’impliquer au plus tôt les athlètes. C’est un projet qui doit répondre aux besoins des athlètes. » Un comité des athlètes a donc été créé en décembre 2015 composé d’athlètes paralympiques et olympiques. « Il y a des réunions régulières (une fois par trimestre) pour permettre aux acteurs de venir régulièrement dans les comités de création. »

Plusieurs athlètes olympiques et paralympiques anciens ou actuels sont consultés pour l’organisation des Jeux à Paris. (Crédits : Paris 2024)

Mais alors, en quoi consiste réellement ces réunions ? « On fait des choix qui nous semblent être les bons mais qui ne répondent pas forcément aux besoins des athlètes, c’est pour ça qu’ils doivent être présents. Les créateurs d’événements ne sont pas forcément sportifs. » Marie-Amélie Le Fur, proche du comité, a également affirmé que « les transports du commun parisiens allaient être conformes pour les handicapés, pour que tous les lieux soient accessibles ».

Paris 2024 comme éveilleur de consciences

Depuis leur création, les Jeux paralympiques n’ont eu que peu de place dans l’espace médiatique international. Événement suivant dans la foulée les JO, les épreuves réservées pour les athlètes handisport n’ont jamais réellement attiré beaucoup de monde dans les stades. « L’enjeu, c’est d’avoir des stades remplis, attirants. Il faudrait retrouver en 2024 ce qu’on a vécu à Londres. »

Les chiffres restent pourtant peu valorisants pour les compétitions handisports. 2,5 millions de billets (https://sport.francetvinfo.fr/les-jeux-paralympiques/21-millions-de-tickets-vendus-pour-les-jeux-paralympiques-15887) avaient été mis en vente par l’organisation londonienne pour les paralympiques de 2012. Pour les Jeux olympiques de la même année, 8,5 millions, soit 3 fois plus. Après les quinze jours de compétition, 80% des billets avaient trouvé preneurs.

Mais pour Paris 2024, Marie-Amélie Le Fur est optimiste quant à l’organisation des paralympiques. « Ils sont sollicités au même titre que les Jeux des valides. Depuis le début pour Paris 2024, on sent que c’est un point qui est relativement naturel dans le développement de cette candidature. »

Si les paralympiques prennent plus d’importance dans le traitement médiatique français, le nombre de licenciés handisport ou en sport adapté augmentera forcément. « Il faut que chaque personne en situation de handicap puisse se dire qu’elle peut pratiquer une activité sportive sans aucun problème. Paris 2024 fera évoluer les mentalités. »

Nicolas Pineau