
Étiquettes
Marineland, toujours dans la tourmente
Entre protestations des défenseurs des animaux et label contesté, Marineland n’en finit pas d’être dans la tourmente. Si le parc aquatique a récemment remporté une victoire juridique sur la reproduction animale en captivité, il fait de moins en moins l’unanimité auprès du public.
« Nous ne pouvons qu’être satisfaits de l’annulation de ce texte, qui nous est toujours apparu totalement illégal et absurde » déclarait l’avocat du Marineland d’Antibes lundi 29 janvier. Le texte en question, c’est un arrêté de 2017 qui interdisait la reproduction des cétacés en captivité. Proposée par Ségolène Royale, alors ministre de l’environnement, la mesure avait provoqué la colère des parc aquatiques. Le Marineland d’Antibes, le Parc Astérix et Planète sauvage avaient déposé un recours auprès du Conseil d’Etat, qui a jugé la procédure irrégulière. Cette défaite a eu un goût amère pour les associations de défense des animaux, d’autant plus que quelques jours plus tard le parc Marineland a reçu le label «Human Certified», une certification du bon traitement des animaux. Si Pascal Picot le Directeur Général de Marineland se félicite de cette reconnaissance de leur « dévouement envers leurs pensionnaires », des interrogations subsistent sur la légitimité de cette appellation. Du côté des militants, ce label » ne fait pas foi « . Enzo Tornato allait souvent à Marineland quand il était petit, aujourd’hui il est membre de l’association PETA, qui lutte pour le droit des animaux.
» C’est juste un truc médiatique pour redorer l’image, c’est juste du greenwashing..«
Enzo Tornato lors de la manifestation de février 2018. Crédit : Peta France
Sur le sujet, Enzo affirme » que le label est payé et délivré par un organisme dont American Humane et Sea sont partenaires. « Libération a mené l’enquête à ce sujet. « Trois mois de paperasse pour quatre jours sur place » écrit le média. Quant à l’affiliation de l’organisation avec le parc Seaworld, elle est confirmée en allant sur le site du parc aquatique américain. La chaîne de parcs avait été au cœur d’une polémique suite à la sortie du documentaire Blackfish qui dénonçait les mauvaises conditions de vie des créatures marines. « C’est juste un truc médiatique pour redorer l’image, c’est juste du greenwashing… » ajoute Enzo.
Pour lui le déclic a eu lieu lors de l’été 2014 : » Je suis passé devant le parc et j’ai réalisé qu’il allait ouvrir un hôtel sur le dos des animaux. Ça m’a rendu fou de me dire que des animaux aussi grands étaient enfermés dans des bassins. » En février, une manifestation coup de poing a rassemblé plusieurs associations anti-captivité face au parc. Un cimetière marin a été installé par PETA. Enzo y était, il s’agissait de montrer » l’opposition suite à l’annulation de l’arrêté par le conseil d’état. »
» J’ai décidé de ne plus y mettre les pieds pour des raisons morales «
Du côté de la ville d’Antibes, la municipalité se garde bien de condamner le parc. Quand on leur demande si Marineland est compatible avec leur politique environnementale, la réponse est claire : « c’est une entreprise privée ». Par ailleurs, la ville salue les efforts du parc en faveur de la préservation naturelle. Elle met en avant l’importance de l’attractivité touristique, et se réjouit que l’entreprise ait gagné le label « Human Certified ». » On est conscients que le parc a fait des efforts, notamment après les intempéries » indique le service communication de la ville d’Antibes. Lors des inondations d’octobre 2015, Marineland a été touché à 90%, une perte de centaines d’animaux a été déploré.
Même aidé de ce label, le parc reste sujet à polémique. En été 2017, avant l’annulation de l’arrêté Pascal Picot confiait : « On parle de l’horizon 2014. Mais la majorité de nos visiteurs viennent voir les dauphins et les orques. On ne pourrait pas tenir le coup sans eux. Il nous faudrait fermer ou imaginer un parc différent« . Du coté des spectateurs, le parc a perdu de la confiance de son public. Rachel, 19 ans, a arrêté d’aller au parc depuis ses 10 ans, elle a une position radicale vis-à-vis du parc : « J’ai décidé de ne plus y mettre les pieds pour des raisons morales : les animaux n’ont pas à souffrir pour plaire à la bêtise des clients ainsi que pour remplir le portefeuille de personnes malsaines ». De son côté Oxana n’a pas mis « les pieds dans le parc depuis 4 ans. » alors qu’elle y allait régulièrement quand elle était enfant. Elle a arrêté d’y aller le jour où elle a « compris que ce n’était pas vraiment la place des animaux d’être ici ». Elle ajoute : « J’ai lu des témoignages de soignants, puis je suis parti en voyage et j’ai vu des dauphins tranquilles dans la mer, ils sont bien mieux que dans des bassins tous serrés… » Malgré plusieurs relances, Marineland n’a pas donné suite à nos sollicitations d’interview.
Roberto Garçon et Arsène Chapuis