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Passager Clandestin (2/2) : Le destin d’une figure monde
Un héros polymorphe dans lequel chacun peut se projeter

La metteuse en scène a fait le choix de ne pas fabriquer de mains à la marionnette, elle a donc des « mains vivantes » qui la rendent plus humaine. Crédit photo : Théâtre National de Nice
« C’est une destinée qui devient plurielle », affirme la metteuse en scène de Passager Clandestin, Sylvie Osman. Dans la pièce qui sera jouée le 31 juillet au Fort Antoine de Monaco, on rencontre Giovanni Pastore le personnage principal et seul personnage fictif de l’histoire, que font vivre les quatre acteurs et leur marionnette aux spectateurs. Giovanni est incarné à la fois par la marionnette mais aussi par les acteurs qui la manipulent tous et la plupart du temps à trois simultanément, grâce à une synchronisation très précise. Ils se succèdent tout le long de la représentation. Cela permet au personnage d’avoir plusieurs corps, plusieurs voix et une énergie toujours différente. La forme du spectacle contribue à cette notion de figure monde, très forte dans l’œuvre. Giovanni Pastore représente chacun et tous à la fois. Ce jeune Italien quitte son village natal et sa famille pour partir à l’aventure. Ce spectacle est à la fois le récit d’une émancipation que chacun a pu vivre mais aussi une ode à l’enfance à travers des souvenirs universels qui transporte le public. Giovanni nous raconte la tendresse de sa mère, les journées d’école mais aussi la douceur de son amour de jeunesse.
« Tout ce qui est raconté, c’est la situation que vivent des milliers de gens »
L’histoire de Giovanni c’est aussi une histoire d’immigration qui fait directement écho à la situation actuelle des migrants en Europe. Une expérience souvent difficile, Giovanni traverse les pays les uns après les autres. Italie, Suisse, Allemagne, France et Angleterre avant d’embarquer sur le Titanic en direction d’une Amérique qu’il n’atteindra jamais. De beaux paysages qui font voyager le spectateur mais surtout une dure réalité, qui reflète celle à laquelle beaucoup sont confrontés aujourd’hui. Giovanni doit travailler dur et faire face au racisme. Lorsque l’on demande à Sylvie Osman ce que lui évoque le nom de la pièce : Passager Clandestin, en quelques mots, elle répond « actualité de toute éternité » et poursuit « tout ce qui est raconté, c’est la situation qu’ont vécue et vivent des milliers de gens ».
Giovanni représente à la fois le passé, le présent et un rêve d’avenir
Cette pièce rappelle aussi les inégalités sociales, les classes populaires et l’idéal du progrès technique de l’Europe du XXème siècle avec le symbole fort du Titanic. Cette époque ressurgit à travers le parcours d’un commis de cuisine oublié dans le drame du naufrage. « La petite histoire de Giovanni rencontre la grande Histoire » affirme Sylvie Osman. Comme pour nous transmettre un message, à l’ère des frontières et de la technologie de masse : celui de ne pas perdre notre humanité. C’est un personnage dans lequel on peut tous se projeter et reconnaître un peu de notre société, de notre monde.
Ana Michelot