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Donald Trump attaqué par un rappeur français
En janvier dernier, le président américain Donald Trump qualifiait Haïti, le Salvador et plusieurs nations africaines de “pays de merde”. Neuf mois plus tard, le rappeur français d’origine haïtienne, Kery James, lui a répondu dans un morceau très critique.
Le 11 janvier 2018, Donald Trump s’est emporté, durant une réunion à la Maison Blanche. Alors que le sujet de l‘immigration était sur la table, le président des Etats-Unis a qualifié Haïti, le Salvador, et plusieurs nations africaines de “pays de merde”. “Pourquoi est-ce que toutes ces personnes issues de pays de merde viennent ici ?”, se questionnait-il, selon le Washington Post. Très vite, les propos de Donald Trump ont fait le tour du monde, affectant notamment le président du Sénégal Macky Sall. Ce dernier s’était dit “choqué par ces propos” dans un tweet.
Un morceau très engagé
Neuf mois plus tard, c’est le rappeur franco-haïtien Kery James qui s’est indigné publiquement. L’artiste a interpellé Donald Trump dans son nouveau morceau “PDM” pour “Pays De Merde”. Dans ce rap, le francilien s’efforce de démontrer que le pays américain n’est pas exempt de tout reproche, bien au contraire, Kery James se questionne : “quel est le pays de merde ?”.
Ainsi, pendant près de quatre minutes, Kery James, épaulé par le rappeur franco-congolais Kalash Criminel, s’attaque aux Etats-Unis et à son 45ème président. Pour cela, le Kery James évoque les moments les plus sombres de l’histoire de la puissance américaine. L’haïtien d’origine fait très vite allusion aux bombardements nucléaires du 6 et 9 août 1945, au Japon : “Bombe nucléaire, qui sont les seuls à en avoir fait usage ? Sauvages !” Tout au long de la musique, l’artiste rappellera le rôle des Etats-Unis dans la guerre du Vietnam, puis au Moyen-Orient, notamment dans le conflit Israëlo-Palestinien. L’actualité récente, en lien avec la Corée du Nord de Kim Jong-un, n’est pas épargnée : “avec toute l’audace qu’on leur connaît, les mêmes voudraient désarmer la Corée.” Enfin, la question de l’immigration mexicaine et sud-américaine a été également abordée, où Trump a été qualifié “d’inculte”.
Kery James accompagne son morceau d’un clip très engagé, dans lequel il dresse un tableau assez sombre des États-Unis. Le rappeur s’en prend aux racines colonialistes et ségrégationnistes de l’Amérique dès les premières minutes du clip. Il met notamment en scène le meurtre d’un natif-américain, et le viol d’une femme noire. Béret sur la tête, à la Che Guevara, Kery James enchaîne les punchlines, une corde au cou et devant des silhouettes encapuchonnées faisant référence au Ku Klux Klan. Mais ce n’est pas tout. Le clip continue ensuite avec une mise en scène de la torture de prisonniers de guerre japonais, et d’une interpellation musclée d’un jeune afro-américain par un officier de police blanc. Il fait ici référence aux violences policières aux États-Unis. Kery James continue de marteler son slogan “Quel est le pays de merde ?” jusqu’à la fin du morceau, avec la scène de violence policière en arrière plan. Enfin, le clip se termine avec une caricature d’un discours de Donald Trump, de dos, qui s’adresse à la foule, accompagné par des “Trumpé, tu t’es Trumpé, tu racontes n’importe quoi, tu t’es Trumpé”.
De Lesquen avant Trump
Figure de proue du rap français, l’artiste du 94 n’en est pas à son coup d’essai. Avec une quinzaine d’albums à son actif, en vingt ans de carrière, le rappeur a toujours porté un discours très engagé, voire polémique. Il s’était déjà attaqué aux hommes politiques français dans des morceaux comme “Racailles” ou “Lettre à la république”. Dernièrement, le rappeur a utilisé sa puissance lyricale pour répondre à des propos injurieux, provenant de politiques. En 2016, Alix Mathurin – alias Kery James -, répond à Henry de Lesquen, ancien homme politique français d’extrême droite et président de “Radio Courtoisie”. Ce dernier avait alors qualifié le rap de « musique nègre », la comparant à de la musique classique, d’une qualité “supérieure” selon lui. De quoi faire réagir le rappeur d’Orly, qui avait alors dévoilé le morceau “Musique Nègre”, en featuring avec Lino et Youssoupha, deux autres figures du rap “conscient”. Les trois artistes avaient abordé tous les clichés liés au rap et aux artistes d’origine africaine, en guise de réponse aux propos racistes d’Henry De Lesquen.
En une journée, le clip « PDM » cumule déjà plus de 400 000 vues sur Youtube. Kery James a interpellé le public américain sur Twitter, en s’exprimant en anglais : “descendant des africains, je ne souhaite plus être américain”. Il a aussi traduit les paroles de sa chanson, dans la langue de Shakespeare, directement sur Youtube. Ce morceau très engagé marque le retour de Kery James, qui en a profité pour annoncer la sortie de son nouvel album le 9 Novembre. L’ancien leader de la “Mafia K’1 Fry” continuera à s’exprimer en faveur de ses origines, et contre les discriminations, toujours présentes au quotidien, que ce soit aux États-Unis ou en France.
Bastien Blandin
Arno Tarrini