Le coulage du Rainbow Warrior

Il y a plus de 30 ans, le Rainbow Warrior, navire de l’association Greenpeace, était coulé par les services secrets français, au large de la Nouvelle-Zélande. L’opération commanditée par le ministre de la Défense français de l’époque et approuvée par François Mitterand, est encore aujourd’hui considérée comme la seule attaque terroriste à s’être déroulée sur le territoire néo-zélandais. Retour sur un crime d’Etat.

 

Le Rainbow Warrior est un navire appartenant à l’organisation écologique Greenpeace. Le 10 juillet 1985, il est à quai à Auckland, en Nouvelle-Zélande. Il se prépare à aller vers l’atoll de Moruroa, en Polynésie française, afin de protester contre les essais nucléaires que l’Etat français effectue sur le site.

 

Le rapport Lacoste, dévoilé en 2005 alors qu’il existait depuis le 8 avril 1986, rend compte de toutes les investigations qui ont donné lieu à ce coulage. Dans ce rapport, l’amiral Lacoste explique que l’affaire débute le 19 mars 1985, lorsque le ministre de la Défense français, Charles Hernu, convoque son directeur de cabinet, Patrick Careil, et lui ordonne de mettre en œuvre les moyens de la DGSE pour interdire au mouvement Greenpeace de réaliser ses projets d’intervention contre la campagne des essais nucléaires français à Mururoa, à l’été 1985”.

 

Cette demande fait suite à une série de rapports qui montre que l’organisation Greenpeace était prête à mener une campagne jugée “plus virulente” par la DGSE. Le service “Action” de la DGSE va prendre le contrôle des opérations et décider de procéder au coulage en bonne et due forme du Rainbow Warrior.

 

La DGSE se sert de trois équipes présentes sur place, et des renseignements fournies par une de ses membres, Christine Cabon, qui avait infiltré l’équipe du Rainbow Warrior auparavant. Le commandant Alain Mafart et le capitaine Dominique Prieur partent dans la nuit du 10 juillet avec 20 kilogrammes d’explosifs dans un canot pneumatique piloté par trois nageurs de combat. Ils se font passer pour les époux Turenge, des touristes français.

 

Le frère de Ségolène Royal, Gérard Royal pilote le canot en compagnie de deux nageurs de combat, Jean Camas et Jean-Luc Kister. L’opération, commanditée par la DGSE a été approuvée par l’Elysée le 28 mai et par le ministère de la Défense le 7 juillet. Selon l’amiral Lacoste, le président de l’époque, François Mitterand, se dit ouvertement favorable à cette opération, en rappelant l’importance des essais nucléaires prévus en Nouvelle-Zélande.

 

Le 10 juillet 1985 à 23h48, une première détonation est entendue au sein du Rainbow Warrior. Cette première détonation est suivie d’une seconde, à 23h51. L’intervalle de 3 minutes entre les deux explosions devait permettre aux membres de l’équipage de quitter le bateau. L’explosion fera cependant un mort, le photographe de l’équipage Greenpeace, Fernando Pereira qui n’avait pas pu évacuer à temps.

 

À la suite du coulage du navire, les faux époux Turenge sont arrêtés par la police néo-zélandaise. Ils sont repérés peu après les explosions, et sont définitivement arrêtés quand le directeur de la police néo-zélandaise, Alan Galbraith, apprend que les passeports des époux Turenge sont des faux. Ils sont finalement mis en examen pour “incendie volontaire et homicide involontaire”.

 

En premier lieu, l’Etat français se dédouane de toute implication dans l’affaire. Les preuves étant accablantes, le 22 septembre 1985, soit deux mois après l’opération, le Premier ministre d’alors, Laurent Fabius confirme l’implication de la DGSE dans le coulage. Les détails de l’affaire seront finalement révélée au grand jour en 2005, par le rapport de l’ancien directeur de la DGSE, l’amiral Pierre Lacoste. Ce rapport sera donné au gouvernement, et le journal Le Monde réussira à s’en procurer des extraits, qu’il révélera au grand public.

Léopold Court

Lounès El Mahouti