Football : L’AS des Moulins construit sa section féminine

Alors que le coup d’envoi de la Coupe du Monde de football féminin approche, le club amateur du quartier des Moulins s’efforce de développer sa section féminine. Un virage amorcé depuis quelques années par le président de l’Association Sportive, Anthony Rimbert.

« Y’avait zéro filles avant, ça n’existait pas ». Anthony Rimbert, président de l’AS des Moulins, est conscient du chemin parcouru depuis qu’il a pris les rênes en 2016. Éducateur au club depuis 2012, c’est lui qui est l’origine du développement des équipes féminines aux Moulins. Un ambitieux projet débuté l’année dernière, avec pour objectif de créer une vraie section féminine à proprement parler, en partant des plus jeunes jusqu’aux adultes. « On est sur un cheminement, mais c’est long, c’est dur surtout dans un quartier sensible comme les Moulins », explique le président. Aujourd’hui, le club compte 350 licenciés dont 42 filles, mais ne compte qu’une équipe senior et une équipe U15 (de 13 à 15 ans). Les filles de moins de 12 ans, une petite dizaine, doivent pour l’instant jouer avec les garçons. Avant 2016 et l’arrivée d’Anthony à la présidence, il n’y avait aucune catégorie de jeunes et une seule équipe senior. Et en plus, elles ne jouaient qu’à sept, faute d’effectif plus fourni.

Les jeunes filles du club s’entraînent sous le regard de Zinedine Zidane © Thomas Gallon

Jessica, 18 ans, joue dans l’équipe fanion et encadre bénévolement l’entraînement des filles U15. Elle a remarqué de nets changements au sein du club et plus globalement dans la région. « Quand j’ai commencé il y a 5 ans, il n’y avait que du foot en salle pour ma catégorie d’âge, aujourd’hui il y a beaucoup plus d’équipes ». Ainsi la jeune Naomi, 15 ans peut rêver de faire du football son métier comme son grand frère Christophe Hérelle, dont le visage s’affiche en grand sur un mur de l’enceinte du terrain d’entraînement. Aujourd’hui titulaire en Ligue 1 à l’OGC Nice, il grandi dans le quartier des Moulins et est passé par l’AS. Sa sœur aimerait suivre ses traces et aller en centre de formation, cependant il n’existe ni centre ni pôle espoir féminin dans la région. Alors que la Côte d’Azur compte de nombreux clubs professionnels, parmi lesquels l’OGCN ou l’AS Monaco, aucun n’a d’équipe féminine dans les premiers échelons nationaux, et aucune joueuse n’est professionnelle.

« Le foot amateur, c’est la base des bases, ça va forcément passer par nous » 

Il est difficile de faire s’affronter exclusivement des filles, surtout les plus jeunes. « Il n’y a pas assez d’équipes, de championnats » déplore Anthony Rimbert. « C’est pour cela que des clubs comme Carros jouent dans la même division que l’Olympique de Marseille par exemple ». Un manque d’échelons au niveau amateur qui fait s’affronter des équipes au niveau très différents. Avec pour conséquence, des écarts très creusés au score. L’équipe senior de Jessica, actuellement dernière du championnat départemental, en a plusieurs fois fait les frais, avec de lourdes défaites 11-0 voire 15-0 [contre Monaco et Cannes]. Mais plus la pratique du football féminin se démocratisera, plus ces obstacles disparaîtront. Et pour Anthony, le football amateur a un rôle essentiel à jouer : « C’est la base des bases, ça va forcément passer par nous ». En coopération avec le district, l’AS des Moulins organise des après-midis d’initiation, pour faire découvrir le foot aux filles, « pour leur montrer que faire que foot n’est pas réservé aux garçons et que c’est aussi bien que faire de la danse ou du tennis » détaille Anthony.

Hugo Lloris et Christophe Hérelle, footballeurs natifs de Nice, s’affichent sur une fresque au bord du terrain du « Stadium » © Thomas Gallon

Une autre entrave peut venir des parents. Le président des Moulins y fait souvent face : « La plupart des parents sont réticents à mettre leurs filles au foot, mais les mentalités évoluent la Coupe du Monde peut jouer en ce sens ». L’évènement qui se tiendra au mois de juin prochain en France va permettre un véritable coup de projecteur sur la pratique féminine du sport le plus populaire du monde. D’autant plus que le stade Allianz Riviera de l’OGC Nice accueillera plusieurs matchs, dont un de l’équipe de France. Un coup de pouce bienvenu pour les clubs niçois, qui prévoient déjà « un afflux de jeunes filles voulant jouer au foot à la rentrée de septembre ». « Peut-être aussi qu’il y en a qui sont timides et qui vont oser franchir le pas » espère Jessica. Encore peu médiatisé mais de plus en plus populaire, le football féminin français voit son développement encouragé par la Coupe du Monde sur notre sol, mais est surtout promu au quotidien par de nombreux club amateurs. Le mot de la fin est pour le président Anthony Rimbert « Le foot féminin, c’est encore de la découverte pour le grand public, mais on va y arriver, on est sur la bonne voie ».

Etienne Le Van Ky