Le drop shipping : la plus légale des « escroqueries » s’installe sur les réseaux sociaux

Depuis maintenant quelques mois, ce nouveau système de commercialisation de biens se crée une place au sein des réseaux sociaux. Mis en avant par la plupart des influenceurs, le drop-shipping représente aujourd’hui un business plus que juteux.

Ce système tripartite de e-commerce est on ne peut plus simple, le client passe une commande sur un site internet du revendeur lequel transmet l’information au grossiste ou drop-shipper qui assure lui le stockage et surtout la livraison du bien commandé.Le plus souvent les revendeurs font passer les objets achetés pour des produits bien plus haut de gamme qu’ils ne le sont vraiment. Par exemple, un bijou vaut 200 euros sut le site de e-commerce sur lequel vous comptez passer un achat. Le revendeur y applique une réduction monstrueuse qui peut monter jusqu’à -80%. Le bijou ne coûte plus que 40 euros et le consommateur pense conclure une bonne affaire. Le problème c’est que cette montre vaut en fait à peine 8 euros sur un site chinois tel que AliBaba.com ou Aliexpress.com. Le fait que les prix sur ces sites web soient très bas se justifient parce que ce sont des grossistes. Non seulement les revendeurs mentent sur la provenance des articles en les certifiant « français » mais en plus de ça il n’assure ni la livraison ni le stockage de ces produits. Ils envoient directement la demande du client au site fournisseur chinois. Les revendeurs peuvent aussi faire passer leurs produits pour des marques déposées telles que Apple, Samsung ou encore Bose, ce qui, pour le coup est bel et bien illégal. Les sanctions maximales prévues par 313-3 l’alinéa 1er du code pénal sont les suivantes : pour les personnes physiques, 5 ans d’emprisonnement et 375.000 euros d’amende et pour les personnes morales (sociétés), 1 875 000 euros d’amende ainsi que des peines prévues par l’article 131-39 du code pénal. Sur la toile, beaucoup de plateformes prônent le drop shipping comme la nouvelle façon de se faire de l’argent facilement, rapidement et sans contraintes de stockage. Sur Youtube notamment on retrouve énormément de vidéos où les protagonistes font l’éloge de ce système de e-commerce en mettant de côté leur morale. Le plus immoral, c’est le fait que la plupart de ces produits sont de très mauvaises qualités, ils deviennent obsolètes au bout de quelques jours voire quelques semaines si vous avez de la chance. Dans ces vidéos, ils mettent en avant le fait qu’on peut « devenir riche en ne faisant presque rien »

Système de e-commerce tripartite

Le drop shipping sur les réseaux sociaux

Les drop shippers demandent en effet de plus en plus les services des influenceurs sur les réseaux tels que : SnapChat, Instagram ou encore FaceBook. Ce type de marketing est, de ce fait, gagnant-gagnant pour ces deux protagonistes, l’influenceur est rémunéré pour la publicité et la visibilité qu’il va offrir et le revendeur voit son nombre de visites explosé à la suite de ces pubs. Les « stars » des réseaux sociaux n’omettent pas d’insister sur les soldes effectués sur les articles. Les influenceurs savent que leur communauté est jeune surtout sur Instagram et Snapchat, ils usent de leur influence et misent sur la crédulité de leur audience pour se faire de l’argent. Ils utilisent alors toutes les failles du système juridique français qui n’interdit pas leur pratique. Miroir du capitalisme moderne, ce type de e-commerce ne peut que s’étendre et s’amplifier avec le temps si aucune mesure gouvernementale n’est prise. De la même façon, il n’existe aucune politique de remboursement prévue dans les Conditions Générales d’Utilisation des sites revendeurs ou alors elles sont impossibles à respecter pour les clients. Par exemple, le site permet aux consommateurs d’être remboursés si et seulement s’ils renvoient le produit moins de 14 jours après l’achat mais étant donné que la livraison se fait depuis la Chine, l’article prend largement plus de deux semaines à arriver.

Témoignage d’une victime

Yann a 18 ans, il est né au XXIe siècle, ce siècle où tout le monde sans exception sait se servir d’internet mais cela ne l’a pas empêché de tomber dans le panneau. « J’utilise les réseaux sociaux très souvent, je ne pense pas que je les utilise plus qu’une autre personne de mon âge mais j’y vais plus d’une fois tous les jours ». Alors qu’il regarde les stories (miniclip d’une minute au format 1/3 sur Snapchat) de ses amis, il tombe sur la story d’un influenceur nommé HectorLeVrai. Dans cette petite vidéo, Yann raconte que le « snapchatteur » fait mine d’avoir gagné un concours lui offrant un bon d’achat de 500 euros sur un site de montres. « Avec l’adrénaline je me suis jeté sur les montres, je les ai commandées dans ma foulée et je ne me suis rendu que le lendemain que j’étais tombé dans un piège ». Malgré toutes les recommandations qu’on peut trouver en ligne à propos des arnaques sur Internet, Yann s’est fait avoir. Tout le monde pouvait obtenir le bon de réduction de 500 euros sur ce site car il n’était pas nominatif et les frais de port sont facturés 10 euros par montre achetée. « J’ai trouvé les montres à 4 euros sur Aliexpress, je me suis senti bête de m’être fait avoir, le pire dans cette histoire c’est ce que je n’ai jamais vu la couleur de ces montres ». Le fait que Yann n’a jamais reçu les montres est la seule chose illégale dans cette histoire. À la suite de cela, il a dû porter plainte à la gendarmerie de sa ville, le site de drop-shipping hébergé dans un pays de l’est avait déjà fermé ses portes. La seule et unique façon pour lui de se faire rembourser fut de se rendre chez sa banque et d’opposer sa carte bancaire pour « utilisation frauduleuse ».

Caricature réalisée par Pierluca Leandri

Martin Bobet