
Ruth Bader Ginsburg, décès d’une icône
La juge américaine à la Cour suprême est décédée à 87 ans vendredi 18 septembre 2020 des suites d’un cancer du pancréas.

Ruth Bader Ginsburg incarnait, dans l’Amérique de Trump, une figure très appréciée des démocrates. Nommée juge à la Cour suprême par Bill Clinton en 1993, elle était la doyenne et la membre la plus à gauche de ce collectif qui rassemble 9 personnes, tous élus à vie.
Une femme de loi aux convictions progressistes
À la fin des années 50, Ruth Bader Ginsburg entame des études de droit. Elle intègre la première promotion mixte d’Harvard où elle est confrontée à la misogynie du milieu universitaire quand l’un des professeurs demande à chacune des neuf étudiantes de sa promotion d’expliquer pourquoi elles occupent « une place qui devrait revenir à un homme ». Ce moment constitue l’un des prémices dans son combat pour l’égalité des genres. Après Harvard, elle poursuit ses études à la faculté de Colombia à New-York et sort major de sa promotion. Malgré son diplôme obtenu avec succès, aucun cabinet d’avocat n’accepte de l’embaucher.
« J’avais deux choses contre moi. Un, j’étais juive. Deux, j’étais une femme » confie-t-elle. Ces refus basés sur des discriminations sexistes font d’elle une fervente militante féministe. En 1972, elle co-fonde le Women’s Rights Project au sein de l’Union américaine pour les libertés civiles. À travers cette association, elle exerce enfin la profession d’avocate et remporte 5 victoires sur 6 plaidoiries présentées à la Cour Suprême, toutes contre la discrimination sexuelle. Quinze ans plus tard, Bill Clinton la désigne comme nouvelle membre de la Haute Cour. Maître Bader Ginsburg devient alors Madame la juge. Pendant 27 ans, dans ce temple du droit américain, elle ne cesse de défendre les droits des femmes mais aussi ceux des homosexuels et des migrants.
Sa lutte pour des minorités ainsi que sa pugnacité dans sa carrière d’avocate ont érigé Ruth Bader Ginsberg en source d’inspiration mais aussi en véritable icône de la pop culture. Lors des rassemblements de la Women’s march aux Etats-Unis en 2017, il n’était pas rare que son portrait ou des slogans tels que « You can’t spell Truth without Ruth »(« Tu ne peux pas prononcer la vérité sans Ruth ) ornent les pancartes des manifestantes.
Très reconnaissable grâce son jabot à dentelle, ses gros colliers et ses lunettes rectangulaires, ses caractéristiques physiques et mimiques sont régulièrement parodiées par les comédiennes de l’émission culte Saturday Night Live. Son histoire, celle d’une ascension dans la vie politique américaine grâce à sa force de conviction, a même donné lieu à un documentaire intitulé « RBG ». Réalisé parBetsy West et Julie Cohen, il a reçu un excellent accueil : 14 millions de dollars de recettes au box-office américain.
Amy Coney Barrett, sa remplaçante conservatrice
Donald Trump a désigné, le 26 septembre dernier, la juge Amy Coney Barrett pour remplacer Ruth Bader Ginsburg à la Haute Cour. La magistrate de 48 ans, connue pour ses convictions religieuses traditionalistes, a notamment exprimé son hostilité pour l’avortement et pour l’accès à la contraception
Cette nomination, une semaine après la disparition de « RBD » a provoqué un tollé chez les démocrates. Le président américain a bénéficié de l’accord de Mitch McConnell, le chef de la majorité républicaine au Sénat pour nommer expressément une nouvelle juge, faveur dont Barack Obama n’avait pas bénéficié en 2016 à la mort du juge Antonin Scalia. L’ancien chef d’Etat s’était vu refusé la candidature de Mick Garland, Mitch McConnell estimait alors que le président démocrate était trop proche du terme de son mandat.
Si le Sénat donne son accord, la Cour suprême sera composée de 6 juges aux tendances conservatrices contre 3 juges plus libéraux. Une majorité qui pourrait influencer l’élection présidentielle Outre-Atlantique. Les juges de la plus haute instance de juridiction du pays ont un statut crucial. Ils veillent certes à la Constitutionnalité des lois mais ils sont surtout garants de prise de décisions sur des grands sujets de société ( le droit à l’avortement, le port d’armes , le réchauffement climatique, l’immigration …) .