
Liberté de la presse : le Monténégro pointé du doigt

« Ce jugement était écrit depuis longtemps », a déploré le journaliste d’investigation Jovo Martinovic. Jeudi 1er octobre, ce dernier a été condamné à un an de prison ferme par la justice monténégrine, qui jugeait plusieurs membres du gang des Pink Panthers, impliqué dans un vaste réseau de trafic de drogue. Depuis cinq ans, le reporter ne cesse de répéter que les liens qu’il a pu entretenir avec le crime organisé concernait uniquement la production de films documentaires sur le sujet. Jovo Martinovic est unanimement reconnu dans le paysage médiatique. En 2018, il a notamment remporté le prix Peter Mackler, qui récompense l’éthique et le courage journalistiques.
Les ONG montent au créneau
La prononciation de sa peine a engendré de vives réactions dans le monde. Huit ONG, dont Reporters sans frontières (RSF) se sont positionnées en faveur de Jovo Martinovic. Dans une déclaration commune publiée lundi, elles ont expliqué que « cette nouvelle condamnation porte atteinte à la liberté des médias et des journalistes au Monténégro ». Johann Bihr, responsable du bureau de Reporters sans frontières en Europe de l’Est et en Asie Centrale, a communiqué son soutien au nom de l’organisation : « Nous renouvelons notre soutien à Jovo Martinovic, journaliste spécialiste des bandes organisées dans les Balkans occidentaux, dont le professionnalisme est unanimement reconnu. »
L’adhésion du Monténégro à l’Union européenne remise en cause ?
Cette condamnation intervient alors que le Monténégro est candidat à son adhésion à l’Union européenne. Celle-ci avait d’ailleurs pris position pour le journaliste, mettant en garde le gouvernement quant à sa gestion de la presse : « La liberté d’expression des journalistes est un élément clé du processus d’adhésion du pays. » Lors du dernier rapport publié par Reporters sans frontières, en 2016, celui-ci n’était classé que 108ème sur 180. Un constat partagé par la Commission européenne, qui, dans son rapport annuel, a expliqué que le Monténégro n’avait effectué « aucun progrès en matière de liberté d’expression ». Si Jovo Martinovic ne retournera pas en prison puisqu’il a déjà été incarcéré quinze mois avant la prononciation de sa peine, son procès pourrait donc avoir des conséquences extrêmement importantes pour les Balkans.
Mathéo GIRARD.