
Après l’attentat de Nice, la France renforce ses mesures antiterroristes
En réaction à l’attentat à la basilique Notre-Dame de Nice, qui a fait trois morts le 29 octobre, des mesures de surveillance et de protection, tant à l’échelle locale que nationale, se sont multipliées en France

Aux restrictions du reconfinement se sont ajoutées, presque simultanément, des mesures visant à endiguer la menace terroriste. Dans la journée du 29 octobre durant laquelle une attaque djihadiste a tué trois personnes au sein de la basilique Notre-Dame de l’Assomption de Nice, le plan Vigipirate a été élevé à l’ « urgence attentat », son plus haut niveau, le temps de la gestion de la crise. Le plan Vigipirate associe tous les acteurs nationaux, de l’Etat aux collectivités territoriales en passant par les entreprises et les citoyens, à une démarche de vigilance, de prévention et de protection face au terrorisme.
Une mobilisation antiterroriste en France qui se caractérise aussi par un renforcement de l’opération Sentinelle. Effective depuis 2015, l’opération déploie 3 000 militaires. Le Conseil de défense et de sécurité nationale a confirmé le lendemain de l’attentat la mise à disposition des préfets de désormais 7 000 membres des forces de l’ordre, pour moitié des gendarmes réservistes. Des mesures toutefois provisoires, l’objectif ayant été de « protéger tous les lieux de culte pour la Toussaint et nos écoles pour la rentrée qui vient » comme l’a précisé Emmanuel Macron lors de son discours le jour de l’attentat.
Des expulsions envisagées
Concernant les pays dont les citoyens sont soupçonnés de radicalisme islamiste, le ministre de l’Intérieur français Gérard Darmanin a présenté à leurs autorités la liste de leurs concitoyens en situation irrégulière. Il s’agit de 231 étrangers suivis pour « radicalisation », dont une soixantaine de Tunisiens, autant de Marocains et un peu plus d’Algériens. Gérald Darmanin était pour cela en visite à Tunis le 6 novembre afin évoquer avec les autorités locales les modalités d’expulsion des ressortissants tunisiens.
Une position partagée par Clément Beaune. Au micro d’Europe 1, le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes a confié qu’il était nécessaire de « dire à ces pays qu’ils doivent reprendre les personnes qui sont identifiées comme leurs ressortissants ». Il a ajouté : « Il faut passer par une action européenne ».
Une protection des écoles privées catholiques et une fermeture des synagogues à Nice
A l’échelle locale, à Nice, des mesures sont également prises. Depuis l’attentat à Notre-Dame de l’Assomption de Nice, 120 CRS sont présents en renfort à Nice. Dans une lettre au Premier ministre, le maire de Nice Christian Estrosi a demandé de « pouvoir bénéficier du droit à l’information sur ceux qui sont fichés comme personnes dangereuses sur le territoire de [sa] commune ou ceux qui sont déboutés du droit d’asile. »
Afin de répondre à des angoisses parentales, l’enseignement privé catholique a musclé la sécurité des locaux scolaires. Selon la direction diocésaine, trois écoles emploient des vigiles qui se rajoutent aux patrouilles des forces de l’ordre dont l’institut Jeanne de France et l’établissement scolaire Sasserno. Un officier de la DDSP est présent au centre de supervision urbain, centre névralgique des caméras de vidéosurveillance dans lequel une salle est dédiée aux écoles. La Ville confirme que des bornes d’appel d’urgence seront installées devant les écoles dans les semaines à venir alors que chaque école dispose déjà, depuis l’attentat du 14 juillet 2016, d’un bouton d’alerte.
En réaction à l’attentat, les synagogues niçoises ont été fermées. « Nous avons décidé de fermer nos synagogues pour ne pas surcharger les missions de forces de l’ordre », a déclaré Maurice Niddam, président du consistoire israélite de Nice au journal Nice-Matin le 4 novembre. Depuis le reconfinement, les églises ont quant à elles été rouvertes.
Des tentations sécuritaires controversées
Certaines idées de mesures créent toutefois la polémique. Christian Estrosi a fait part de sa « colère » sur Europe 1, renouvelant son appel à « modifier la Constitution ». L’objectif « mener la guerre » contre une idéologie qu’il qualifie d’ « islamo-fascisme » car « la liberté fondamentale n’est pas la Constitution, c’est celle de vivre en sécurité ».
Trois jours après l’attentat de Nice, le maire de la ville a aussi demandé au Premier ministre de pouvoir immédiatement avoir recours à la reconnaissance faciale. Il a expliqué que « le système de reconnaissance faciale expérimenté en 2019 lors du carnaval dans notre ville, permet, en insérant l’image du visage d’un individu dans le logiciel, de retracer immédiatement son parcours ». Quant à Eric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes, il a même appelé sur la chaîne Cnews à la création d’un « Guantanamo à la Française ». A l’initiative d’un mouvement d’hommage devant la basilique Notre-Dame de Nice, Robert Injey, cadre du Parti communiste français, a préféré de son côté affirmer : « Aujourd’hui, nous nous unissons contre le terrorisme, mais aussi les dérives sécuritaires dans notre pays. »
ADRIEN PAIN