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Le racisme anti asiatique s’amplifie depuis la pandémie de Coronavirus

Des messages haineux et des attaques physiques envers les personnes d’origine asiatique, accusées d’être à la source de la propagation du SARS-CoV-2, se sont répandus dans l’espace public et sur les réseaux sociaux dès le début de la pandémie.

Une jeune femme s’affichant avec le #Jenesuispasunvirus Photo ER /Ludovic LAUDE

L’association des Jeunes Chinois de France (AJCF) avertissait le 30 octobre dernier qu’un  post faisant appel à «agresser chaque chinois» dans les départements d’Île-de-France circulait sur les réseaux sociaux. Cette publication s’accompagnait de messages et injures parmi lesquelles on peut notamment lire « On arrête les mangas désormais c’est la chasse aux asiatiques » ou encore « Hitler aurait dû tuer les Chinois, pas les Juifs ».

La Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) a annoncé son intention de saisir la justice « pour que cessent ces appels à la haine contre les personnes d’origine asiatique ». SOS Racisme a pour sa part incité les personnes victimes de ces attaques à le signaler à la plate-forme Pharos (plate-forme chargée de signaler les contenus illicites sur Internet). Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour « provocation publique à commettre une atteinte à l’intégrité physique d’une personne à caractère raciste ». Les investigations ont été confiées à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP).

Un racisme anti-asiatique dès le début de la pandémie de Covid-19

Alors que les premiers cas officiels de Coronavirus sont détectés en France le 24 janvier, les insultes à caractère raciste prolifèrent sur les réseaux sociaux. Le hashtag #JeNeSuisPasUnVirus est lancé quelques jours plus tard sur Twitter. Les victimes de ce racisme ambiant témoignent à travers cet hashtag des regards de travers, des insultes dans les transports en commun ou des humiliations provoqués par des blagues douteuses. Les internautes d’origine chinoise mais aussi vietnamienne ou cambodgienne attestent de ces discriminations, révélant l’ignorance qui conduit à l’amalgame entre les différentes ethnies asiatiques. Si le racisme anti-asiatique se retrouve en ligne et dans la rue, il est aussi perpétué par certains médias. Le courrier Picard titrait sa une du dimanche 26 janvier « Alerte jaune » suivi d’un éditorial intitulé « Le péril jaune » afin d’évoquer l’arrivée du virus en France. Le quotidien régional a par la suite présenté ses excuses « à tous ceux qui ont pu être sincèrement choqués », la rédaction explique avoir voulu « relativiser justement l’éventuelle panique irrationnelle pouvant se répandre après l’apparition des premiers cas en France ».

Cette Une du Courrier Picard fait état d’un racisme banalisé voir décomplexé envers les populations d’origine asiatique.

Une xénophobie dans le monde entier

En mai dernier, l’ONG internationale Human Rights Watch annonçait sur son site : « Le Covid-19 attise le racisme anti-asiatique et la xénophobie dans le monde entier ». En Italie, les résidents d’origine chinoise, environ 300 000 personnes, ont été victimes de violences et de boycott économique lors du premier confinement. À Milan, la majorité des commerçants du « China Town » milanais ont fermé leurs portes par crainte de représailles.

Au Canada, la police de Vancouver enquêtait au mois de mai sur 29 incidents contre des membres de la communauté chinoise (qui représentent 26% de sa population) survenus après les mois suivants l’annonce du premier confinement, soit sept fois plus par rapport à la même période l’an dernier.

« J’ai ressenti un mélange de choc, de dégoût et de tristesse quand ça m’est arrivé », déplore Trixie Ling, une habitante de Vancouver d’origine chinoise, victime d’une agression raciste début mai. Un inconnu l’a insultée avant de lui cracher au visage. Cette accumulation d’attaques racistes envers les asiatiques, intensifiée depuis l’éclosion du Coronavirus se nourrit certes de l’amalgame entre le pays d’origine du virus et les personnes d’origine ou de nationalité asiatique mais également de la crainte d’une surpuissance chinoise. Selon Nicolas Bancel, professeur spécialiste de l’histoire coloniale à l’Unil,« La Chine, telle qu’elle est présentée en Europe, fait peur. Elle est désormais la deuxième puissance mondiale et sera inévitablement bientôt la première. Ses entreprises internationales sont perçues comme visant l’hégémonie régionale, voire mondiale. »

La pandémie de Coronavirus se révèle comme un prétexte pour stigmatiser les asiatiques. Si le racisme anti-asiatique était déjà sous-jacent, la crise sanitaire a exacerbé ces aspects les plus violents.

ALIENOR RUEL