janvier 02

La cartographie à l’épreuve du numérique

Image d’illustration tirée du site internet http://johannadaniel.fr

Une mutation des pratiques inédite…

La cartographie, cet art si spécifique, connaît actuellement de profonds bouleversements au sein même de sa conception. L’apparition du digital remet en question toute la chaîne de production : du créateur au lecteur en passant par la création d’un nouveau poste, le Webdesigner. Personne n’y échappe et c’est ce qu’explique Véronique Malécot lors d’une conférence donnée en 2018 à l’Ecole Normale Supérieure de Paris. Cette journaliste-cartographe pour le journal Le Monde raconte qu’à partir de 2013, les services print et web du quotidien national ont fusionné : le service infographie étant devenu de facto « bi-média », soit aussi bien capable de travailler pour le papier que pour internet. Ce changement soudain a requis l’imagination de nouveaux formats et, ainsi, l’apprentissage des codes propres à ce nouvel environnement, chose loin d’être aisée après des années de stabilité. Citons la temporalité propre à la toile, où les cartographes n’ont bien souvent que quelques heures pour ciseler leurs cartes. Et si au départ le web paraissait comme un espace libre, sans contraintes, l’inverse s’est vite avéré. Le site internet du Monde restreint lui-même le champ d’action du cartographe par la modification des formats, la taille des typographies ou encore le niveau de complexité d’informations. Cette mutation des pratiques concerne tous les supports numériques : et comme l’information est plus consommée sur le site via un mobile qu’un ordinateur (54,9 millions de visites contre 37,8 millions), il est donc nécessaire de se réinventer. Une nouvelle fois.

… qui exige une réflexion de renouvellement permanent

L’enjeu est le suivant : comment conserver le niveau d’analyse des cartes papier tout en proposant des cartes lisibles sur un écran de téléphone ? La solution tient à la décomposition d’informations : c’est à dire, tel que le démontre Véronique Malécot à travers l’exemple de la guerre yéménite, d’une série de cartes assez simples à lire (peu de figurés et de texte par carte) pour un lecteur sur mobile. Elle explique que ce format-là, vertical, est nommé « responsive » : autrement dit, aussi bien lisible sur ordinateur que sur téléphone… le tout en essayant de préserver le raisonnement et le niveau de détail des cartes papier. Comme dans un article de presse, « il y a une importance de scénariser l’information […] de faire comprendre une situation la plus clairement possible au lecteur. » Voici l’un des plus beaux défis de la cartographie numérique.

Théo Sivazlian.