Les réseaux sociaux, terrain incontournable de l’engagement politique des jeunes

Les organisations politiques qui s’adressent aux jeunes entre 15-28 ans développent leurs activités sur les réseaux sociaux. Entre coup de com’ et engagement sur le terrain, le digital essaie de trouver sa place en politique.

« La communication joue un rôle de mobilisation », affirme Margaux Cappelaere, chargée de communication pour l’Organisation Internationale de la Jeunesse (anciennement Syndicat Général des Lycéens), une association qui promeut des valeurs comme l’égalité des genres, l’engagement au sein de l’Europe, et le respect de l’environnement. Que ce soit à gauche, à droite, ou pour défendre une cause apartisane, les jeunes se mobilisent politiquement sur les réseaux sociaux. Ces derniers sont un moyen efficace pour « montrer ce qu’on fait au sein de l’OIJ et le mettre en valeur », affirme Margaux Cappelaere. L’objectif pour les organismes de jeunesse à vocation politique est de « mettre en action les jeunes et les encadrer » explique Léonard, chargé de communication chez les Jeunes Communistes (JC). D’après Léopold Polet, représentant des jeunes au sein de Nouvelle Énergie (le parti, orienté à droite, de David Lisnard, maire de Cannes), il s’agit « d’apporter de la modernité ». Il explique : « on ne va pas se mentir, la politique c’est pas forcément pour les jeunes aujourd’hui. Donc pour les attirer, on utilise les réseaux sociaux. » Un outil de séduction bien approprié quand on sait que près d’un jeune sur deux s’informe d’abord sur les réseaux sociaux, d’après l’Ifop. Mobiliser les troupes semble être devenu une activité numérique autant que physique, à l’heure où la jeunesse peine à s’intégrer dans le dialogue politique traditionnel. Comme le jeune électorat des années 70, la jeunesse d’aujourd’hui ne se contente plus des actions des représentants, notamment sur les questions environnementales. Politique traditionnelle et novatrice sont en désaccord. Les réseaux sociaux sont devenus un moyen pour la jeunesse de se faire entendre et de s’organiser. 

Une vitrine pour la politique d’aujourd’hui

Les Jeunes Communistes mettent en avant la « bataille idéologique » qui se mène sur les réseaux sociaux. « L’extrême droite a été très présente dans cette bataille. Donc nous, il faut qu’on apporte une réponse face à ça. », explique Léonard.Fervent supporter du maire de Cannes, Léopold Polet complète : « le but premier, c’est d’accompagner Lisnard dans ses campagnes, de lui faire de la promo. » Et la promotion d’idées passe désormais par des contenus qui parlent aux jeunes. « On est dans une société de l’image […] donc on joue beaucoup sur les visuels et la vidéo », confie Léonard. Il explique : « quand il y a une manifestation, on fait des visuels d’appel à la mobilisation. On fait aussi des vidéos quand il y a une intervention du secrétaire général, qu’il répond à l’actu par exemple. » 

À chaque réseau social, son audience

Chaque réseau social a sa particularité, et sera donc utilisé différemment par les chargés de communication. Léopold Polet estime qu’ils sont désormais incontournables, et Léonard (des JC) distingue les différentes plateformes : pour Twitter, « c’est plus notre couverture médiatique. On retweete des infos de journaux. » Et d’ajouter : « Souvent, c’est plutôt l’Humanité parce qu’ils vont dans notre sens. »

«Facebook est dépassé aujourd’hui. C’est les plus vieux qui sont sur Facebook. […] Donc on est plutôt axé sur Instagram parce que c’est là qu’il y a notre public. » Le fonctionnement même de ce réseau social leur permet de recruter plus facilement des jeunes : « On peut viser directement notre public. On ajoute des jeunes et ensuite ils nous follow. ». Alors que sur Facebook, il faut publier massivement pour être vu et apparaître sur le fil d’actualité.

Dans la continuité d’une mobilisation traditionnelle

Les réseaux sociaux sont aussi une porte d’entrée vers le recrutement de nouveaux adhérents. « Sur nos réseaux sociaux, on redirige régulièrement vers le site internet où on publie les communiqués », explique le chargé de communication des jeunes communistes. Sur les comptes de l’OIJ, « les gens viennent […] pour poser des questions sur l’organisation », confie Margaux Cappelaere. Mais les réseaux sociaux permettent surtout d’appeler à la mobilisation. « Après chaque mobilisation, on a des adhésions en plus, confie Léonard. Par exemple, pendant les manifs contre la loi Travail, on avait 10 ou 20 adhésions les jours qui suivaient les mobilisations. » Même si la couverture médiatique offre une visibilité non négligeable et permet de recruter de nouveaux adhérents, ce n’est parfois pas leur priorité, comme le souligne la chargée de communication de l’OIJ: « Il y a un effet boule de neige : on recrute du monde, mais ce n’est pas notre objectif premier. »

Compte tenu des dernières restrictions sanitaires, les rencontres et les manifestations sont de plus en plus difficiles à mettre en place. De ce fait, le parti de David Lisnard organise sa mobilisation via « les réseaux sociaux et les réunions zoom. » Léopold a bien conscience qu’il s’engage de façon « totalement dématérialisée […] Si tout ça n’existait pas, il n’y aurait pas de mobilisation… Et on aurait moins d’adhérents bien sûr.» L’OIJ peut, grâce à son statut d’association et non de parti politique, adopter une autre stratégie : « On essaie de plus en plus de s’implanter dans les lycées. Si les réseaux sociaux sont amenés à disparaître demain, on a déjà des ressources pour pallier ce manque. On a des prospectus, des affiches, des kakemonos, qu’on distribue dans les lycées. » Un des combats actuels de L’OIJ : la mise en place de distributeurs de protections périodiques dans les lycées pour lutter contre la précarité menstruelle. L’organisation travaille en partenariat avec les ministères de l’éducation nationale et de la jeunesse, de la culture, et de la transition écologique et solidaire. En plus de ses interventions en milieu scolaire, elle déploie son action à l’échelle locale, comme internationale en organisant des conférences, des opérations humanitaires, etc… Il est aujourd’hui difficile de se passer des nouvelles technologies, mais les façons traditionnelles de rallier les jeunes à une cause ou un parti ne sont pourtant pas délaissées.

Réflexion de la rédaction :

Si les réseaux sociaux, et Twitter en particulier, sont un moyen d’étendre le terrain d’action des partis et organisations politiques, ils sont aussi connus comme étant la foire aux débats houleux. Des sujets de société sont souvent mis sur le tapis : antisémitisme, violences policières, immigration, conflits géopolitiques, laïcité, etc. font réagir la twittosphère. Les personnalités publiques, politiques ou non, et les utilisateurs anonymes donnent leur point de vue sur la plupart des sujets d’actualité. L’opportunité de s’exprimer est donnée à tous, dans le respect des règles de la communauté. Ceux qui y dérogent sont suspendus ou censurés. L’exemple du président américain le montre bien. Pour autant, Twitter est régulièrement accusé de laxisme en termes de modération des contenus haineux. À ce sujet, voir l’article du Monde (Twitter assigné en justice pour son « inaction massive » face aux messages haineux).

Noé Girard-Blanc

Jessica Granato

Arthur Grollet

Samuel Gut

Raphaëlle Hutin