
Étiquettes
Les femmes sous-représentées dans le monde de la bande dessinée
A l’occasion de la 49ème édition du Festival de la Bande Dessinée d’Angoulême, le manque de femmes sélectionnées parmi l’ensemble des artistes est révélateur d’une discrimination au sein d’un art largement masculin.

Pendant longtemps, les femmes n’étaient présentes dans la bande dessinée que dans les illustrations réalisées par des hommes. Aujourd’hui, elles se battent pour montrer qu’elles sont aussi des artistes, au style affirmé et au talent tout aussi développé. Pourtant, cette volonté de reconnaissance peine à être entendue. Cette année, pour le Festival d’Angoulême qui s’est tenu du 17 au 20 mars, 24% des œuvres susceptibles de remporter un prix ont été réalisées par des femmes. Une écrasante majorité d’hommes, même si la part des femmes augmente. Lors de la dernière édition, seulement 17,5 % des œuvres éligibles à Angoulême étaient signées par une artiste féminine.
« Les gens du Festival d’Angoulême sont de l’ancienne génération »
Si les femmes restent encore largement sous-représentées dans le neuvième art, des progrès sont constatés, notamment depuis le grand scandale ayant entaché le Festival d’Angoulême en 2016. Cette année-là, aucune femme n’était en lice pour remporter le Grand Prix qui récompense un ou une artiste pour l’ensemble de sa carrière. Une nouvelle qui a suscité l’indignation, à tel point qu’une association de lutte pour la reconnaissance des femmes dans la BD a appelé au boycott de l’événement. Le mouvement a été suivi, puisque dix des trente hommes sélectionnés ont demandé à ce que leur nom soit retiré de la compétition, en signe de solidarité. Parmi eux, l’auteur Riad Sattouf s’était opposé à une absence totale de femmes dans la sélection : « Il se trouve que cette liste ne comprend que des hommes. Cela me gêne, car il y a beaucoup de grandes artistes qui mériteraient d’y être ».
Depuis cet épisode, les femmes reprennent leurs droits et s’engagent pour faire changer les codes de la bande dessinée. C’est le cas de Florence Cestac, première lauréate du Grand Prix d’Angoulême en 2000, qui dénonce un univers sexiste : « Les gens du Festival d’Angoulême sont de l’ancienne génération. Celle où les hommes avaient l’habitude d’être entre eux, donc ils s’imaginent que c’est toujours comme ça. Mais les temps ont changé : les femmes sont là, elles ont des œuvres et elles sont importantes ».
Un premier pas en avant
Les événements internationaux célébrant la BD veillent désormais à inclure les femmes dans les remises de prix. En 2019, la Française Pénélope Bagieu remporte même le prestigieux prix Eisner, l’équivalent des Oscars dans la bande dessinée, pour sa série Les Culottées, preuve que le changement s’opère doucement. Cette année, petite révolution, les finalistes pour le Grand Prix d’Angoulême n’étaient que des artistes féminines. C’est finalement la Québécoise Julie Doucet qui a décroché ce titre, soit la quatrième femme seulement en 49 éditions.
Si les bédéastes féminines parviennent à impulser une dynamique de changement, de nombreux progrès peuvent encore être réalisés. C’est en tout cas dans ce sens que leur engagement se manifeste.
Killian Chapus