Surfer à Cannes : une discipline impossible ?

Labellisée « ville de surf » depuis le 29 juillet 2022, la nouvelle a étonné locaux et adeptes de ce sport de glisse. Et pourtant, la mairie assure développer la pratique.

Au-delà des clichés du film Brice de Nice, il est possible de prendre des vagues en Méditerranée. Quatorze communes sont labélisées « ville de surf » par la Fédération Française de Surf et Cannes est la première sur la côteméditerranéenne. Le label récompense la promotion du sport sur le territoire de la commune avec des critères qui englobent l’aménagement du littoral, la formation, l’organisation d’événements… La Mairie de Cannes compte devenir capitale du sport en plein air depuis 2016 et cela passe aussi par les sports en pleine mer. 

Une pratique à la marge

Des bons spots, il en existe à Cannes : le Riff aux abords du Palm Beach au bout de la Croisette, la plage numéro 17 face au bâtiment de Thalès ou le Batéguier à l’ouest de l’Île Sainte-Marguerite, sont réputés pour leurs vagues… en hiver surtout. « Au plus fort, on peut atteindre des vagues d’un mètre cinquante mais c’est rare. Sinon c’est plutôt entre 30 et 80 centimètres et ça suffit pour surfer ! » assure Axel, l’un des 20 « guerriers ». Surnom que s’est auto-attribué le petit groupe de surfeurs cannois.

Le Label « ville de surf » a été « une surprise » pour le surfeur et ses collègues. « Oui c’est possible de prendre des vagues mais on ne peut pas parler d’un vrai engouement. Après, si ça peut développer la discipline, tant mieux ! » lâche avec un sourire amusé le sportif. Dans le seul magasin dédié aux activités nautiques à Cannes, la vendeuse Marylin confie « ne jamais louer de surf ». Les autres sports comme la planche à voile, le paddle, le kitesurf, le kayak ou même le pédalo rencontrent « bien plus de succès ». Ici aussi, le label fait sourire Marylin et son patron Aldo. 

Une attribution avant tout « symbolique »

Pour obtenir la certification, il faut répondre à plusieurs critères contrôlés par une commission. Pas besoin d’avoir des vagues géantes comme en Polynésie : deux éléments sont essentiels pour la Fédération Française de Surf. La première obligation est d’avoir au moins un club affilié à la fédération, ce qui est le cas avec Cannes Jeunesse. La seconde porte sur le soutien de la commune pour le développement du surf et de ses dérivés, tel que le surf-paddle. En plus de proposer des aménagements du littoral favorables à la pratique pour la population locale et les touristes.

La mairie de Cannes se réjouit de la « concrétisation directe de la politique pour la pratique sportive en libre accès et comme un art de vivre », notamment mise en œuvre via le programme « Cannes, capitale du sport en plein air » lancé en 2016 et désormais « en pleine mer » via l’élargissement aux activités nautiques depuis plusieurs années. Certes, Cannes est la première ville labellisée de Méditerranée mais aussi la seule à avoir candidaté. À Marseille, Palavas-les-Flots, Martigues ou Perpignan, il existe aussi des spots remarquables mais l’attribution est surtout « symbolique » confesse la Fédération Française de Surf même si « c’est très important d’être premier ».


On a testé pour vous… il faut un niveau avancé !

Surfer en été est quasiment impossible sur les spots Cannois : l’absence de houle complique l’affaire ! Mais en hiver et sans un vent qui « rabote les vagues », on peut espérer se lever sur sa planche. Attention toutefois, les débutants auront du mal à apprendre en raison de la configuration des sites : présence de rochers au fond, murs ou plages très courtes… on est loin des grandes et profondes plages de l’Atlantique. Après avoir dégoté une planche et une combinaison, nous avons attendu une journée de gros temps pour espérer des vagues suffisantes. Au Riff, à la Pointe Croisette, un escalier permet de descendre à l’eau. Ni une ni deux, nous accrochons notre leash – ce filin qui relie le surfeur à sa planche – et profitons des dernières lueurs du jour pour attraper quelques vagues. L’absence de courants élimine la plupart des dangers pour un surfeur imprudent mais attention à ne pas se faire projeter contre la digue par une vague un peu trop forte. Se déplacer sur le spot n’est pas très compliqué pour trouver le bon angle mais la principale limite du surf à Cannes réside toujours dans ses vagues. Elles ont très peu de force ! Une bonne rame dynamique est essentielle pour prendre suffisamment de vitesse et s’élancer. Malgré le mauvais temps, elles ne dépassent pas les 50 centimètres et le surfeur débutant peinera à se lever sur « les lisses » – des vagues qui ne se sont pas encore brisées. Espérer prendre des « mousses » – l’écume provoquée par la casse d’une vague – est dangereux sur notre spot de test. Le risque de foncer dans le mur ou tomber sur les rochers est trop grand. Glisser à Cannes est réservé aux bons surfeurs, même si la pratique d’autres sports tels que la planche à voile ou le kitesurfest plus aisée. Au moins, l’eau était d’une température confortable avec 17 degrés mais la sortie refroidit tout surfeur : entre la pluie glaciale et le vent… Un méchant rhume est vite arrivé !

Victor Letisse – – Pillon