mars 30

Que se cache-t-il derrière les chiffres de l’INSEE ?

Chaque année l’INSEE réalise des centaines d’enquêtes partout en France afin de mesurer la conjoncture économique du pays. Des enquêteurs sont présents sur le territoire dans le but de recueillir et analyser des données, mais de quelle manière collectent-ils les informations ?

L’INSEE a été créé par la loi de finances du 27 avril 1946. Image : insee.fr

L’institut national de la statistique et des études économiques est présent sur tous les sujets, en passant des enquêtes sur les inégalités entre les ménages, aux chiffres de l’inflation, au recensement de la population et d’autres encore. Pour réaliser ces enquêtes plus de 900 enquêteurs sont déployés dans toute la France. “Chaque personne fait une dizaine d’enquêtes différentes par an” affirme un enquêteur de l’INSEE en région grenobloise*. Les enquêtes ne sont pas réalisées au hasard. Des ministères peuvent demander à l’institut de réaliser des sondages, car ils ont besoin de “faire un point” sur un sujet, déclare-t-il. Les entreprises peuvent aussi commander des sondages à l’INSEE. Le Conseil National de l’Information Statistique (CNIS) donnera par la suite, son avis sur l’intérêt de produire de nouvelles statistiques et également d’améliorer celles déjà existantes.

Des enquêtes menées au plus près des français

Les enquêtes menées doivent être les plus justes possibles. Les enquêteurs doivent donc s’immiscer au plus près des ménages avec des questions qui peuvent parfois rentrer dans leur intimité. Ils les interrogent sur des aspects personnels tels que l’argent, leurs financements, la religion, leur sexualité ou encore l’orientation politique. Pour l’enquêteur interviewé, il est nécessaire d’instaurer un véritable “climat de confiance entre nous [les enquêteurs] et les ménages. Sans cela ils ne nous répondront pas. Il y a vraiment une dimension très relationnelle dans ce métier”. 

Le choix des personnes enquêtées se fait par tirage au sort au sein d’un échantillon plus ou moins aléatoire, suivant le type d’enquête réalisée. Cet échantillon est représentatif de la population. Par exemple, sur l’enquête “Entrée dans la vie adulte” (EVA), l’échantillon sera fait avec des jeunes entre 18 et 26 ans. La taille des échantillons varie suivant l’enquête. Sur la question du chômage, plus de 200 000 ménages sont interrogés, contre 10 000 ménages sur d’autres sujets, selon les besoins statistiques de l’enquête. 

En réalité, l’échantillon n’est pas constitué d’individus mais plutôt de logements. Ce sont des logements qui sont tirés au sort. Le premier travail de l’enquêteur est donc d’aller sur le terrain afin de savoir si se trouve dans le logement la personne enregistrée dans la base de données de l’INSEE. Si c’est le cas, la personne est interrogée. Mais dans le cas contraire, les enquêteurs doivent découvrir qui est le nouvel habitant du logement afin de l’interroger. “C’est un travail de repérage très important à faire, avant même de commencer les enquêtes” selon l’enquêteur grenoblois.

L’INSEE, un gage de fiabilité 

99% des enquêtes de l’INSEE sont légalement obligatoires, encadrées par la loi du 7 juin 1951 sur le secret statistique et l’obligation de participer aux enquêtes de l’INSEE. Les individus sont prévenus par courrier, par mail ou alors par téléphone qu’un enquêteur va venir chez eux réaliser une enquête. Les ménages ont l’obligation d’y répondre, même si parfois les enquêteurs font face à des réticences. “Lorsqu’il y a un refus, on ne va pas faire intervenir la police. En théorie un individu tiré au sort qui refuse de participer est passible d’une amende. Dans les faits, c’est très rarement appliqué. On multiplie les courriers et rappels à la loi. Si la personne ne répond toujours pas par la suite, on laisse tomber”. L’amende qui devrait normalement être appliquée en cas de “refus persistant”, est de 150€, peu importe le type d’enquête. Mais l’enquêteur de l’INSEE affirme que le taux de personnes qui ne souhaite pas répondre reste “assez faible”. De l’ordre de 5%, il alimente la statistique de refus annuel au niveau national. 

“Cette proportion de réponses peu fiables est déjà incluses”

L’institut français garantit des chiffres de qualité et a pour principe l’exactitude et la fiabilité de ces données. Toutes les productions statistiques sont le fruit de plusieurs vérifications tout au long de leur chaîne de production. Il faut s’assurer que les questionnaires sont cohérents et que les questions ne sont pas biaisées.Lorsque les enquêteurs se rendent auprès des ménages, ils sont obligés de s’appuyer sur ce qui est déclaré par les interrogés. En pratique, si les enquêteurs se rendent compte que la personne à qui ils font face répondent des faits absurdes, ils en parlent à leur responsable. Mais selon le statisticien en région grenobloise, “Cette proportion de réponses peu fiables est déjà incluses dans la construction statistique de l’enquête et dans l’échantillon. L’échantillon est suffisamment gros pour effacer l’impact de quelques réponses approximatives.” 

Les enquêtes de l’institut de la statistique sont donc toujours fiables. Des contrôles sont faits régulièrement pour assurer la cohérence et la validité des données publiées par l’institut. 93 % des répondants à un sondage de l’INSEE en 2016, trouvent les statistiques de l’institut pertinentes et 79 % déclarent que ces chiffres reflètent la situation économique de la France. 

*L’enquêteur n’a pas souhaité que son nom soit diffusé.

Faustine Bassac