
Étiquettes
L’autisme, un handicap méconnu en quête de reconnaissance
En France, 700 000 personnes vivent avec un trouble du spectre autistique. Entre méconnaissance et préjugés, l’inclusion est difficile et l’enjeu de la sensibilisation est important pour les personnes concernées.

700 000, c’est le nombre de personnes porteuses d’un trouble du spectre autistique en France selon l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Aujourd’hui, un bébé sur 100 naîtrait autiste dans le pays. Pour toutes ces personnes, l’inclusion dans la société est un combat de chaque instant. De nombreuses familles concernées par l’autisme et des associations se battent pour sensibiliser à ce handicap. Souvent mal jugé et peu connu par la population d’après les principaux concernés, l’autisme est un trouble neurodéveloppemental dont les manifestations varient d’une personne à l’autre.
« Il n’y a pas une personne autiste qui ressemble à une autre personne autiste »
« Il y a autant d’autistes que de formes d’autisme » souligne Stéphanie Clément, maman de Sacha, un enfant autiste de 10 ans. Des propos partagés par Corinne Baculard, fondatrice de l’association niçoise Approche Globale Autisme et elle aussi maman d’une enfant autiste : « il n’y a pas une personne autiste qui ressemble à une autre personne autiste ». Pour les deux femmes, c’est cette multitude de formes qui entraîne la méconnaissance de ce handicap. « L’autisme, c’est très vaste » insiste la présidente de l’association. « Dès qu’ils entendent parler d’autisme, les gens se perdent, font des généralités. Tout ça, c’est de la confusion. » Stéphanie Clément confirme ces paroles : « Dans la perception des gens, l’autisme c’est soit Rain Man [ndlr. Rain Man de Barry Levinson est un film mettant en scène un « autiste savant » interprété par Dustin Hoffmann.], soit les formes hyper sévères d’autisme qu’on voit dans des reportages à la télé, d’enfants qui s’automutilent… Il n’y a pas d’entre deux, et c’est problématique ». Corinne Baculard résume en caricaturant : « ce n’est pas parce qu’on est autiste qu’on connaît toutes les tables de multiplication par cœur ».
Au quotidien, la méconnaissance de l’autisme se caractérise donc par de nombreux préjugés. « Tu es autiste ? Ça ne se voit pas ! » Ces mots, Corinne Baculard, qui côtoie de nombreuses personnes porteuses de troubles autistiques par le biais de son association, les a déjà entendus. Ou bien encore « elle est trop belle pour être autiste ». Pour Stéphanie Clément, qui subit les préjugés chaque jour avec son fils Sacha, porteur de ce handicap, il y aurait deux versants : « Selon le contexte, soit on le trouve introverti, soit on le trouve mal élevé ». Et forcément, « ça ne fait pas plaisir » avoue-t-elle. Celle qui est professeure d’espagnol ajoute que lorsque ce sont des enfants qui sont concernés, leurs pairs vont les trouver « bizarres ». Les plus jeunes remarqueront que les enfants autistes sortent parfois du lot et « ils vont se dire qu’ils ne font pas comme eux, qu’ils font des trucs qu’ils ne comprennent pas ».
Un handicap invisible victime de méconnaissance et de préjugés
« L’autisme n’est pas marqué sur le front de la personne » concède la fondatrice de l’association Approche Globale Autisme basée à Nice. Il s’agit en effet d’un handicap dit « invisible », élément qui favoriserait la méconnaissance de ce trouble du neurodéveloppement et la circulation des préjugés. Pour Stéphanie Clément, « c’est cela qui crée l’incompréhension chez les gens ». Même s’ils sont informés et sensibilisés au handicap d’une personne autiste, « très vite, ils l’oublient, et ça, c’est problématique ». C’est là qu’est tout l’enjeu de la sensibilisation aux troubles du spectre autistique (TSA), comment faire connaître et reconnaître aux yeux de tous ce handicap invisible qui se manifeste d’une façon si différente d’une personne à l’autre ?
Pour les deux femmes que nous avons rencontrées, il semble nécessaire de sensibiliser la société à ce handicap. Leur objectif, partagé par toutes les personnes autistes et leurs proches : mettre fin aux préjugés. Corinne Baculard entre en contact par le biais de son association avec beaucoup de personnes porteuses de troubles du spectre autistique. Elle a remarqué que « les personnes autistes elles-mêmes se plaignent de ne pas être représentées, elles aimeraient bien venir parler [dans les médias] de leurs problèmes, de leurs attentes ». Pourtant, les personnes autistes se font rares notamment sur les plateaux de télévision. « Je trouve dommage qu’on ne [les] invite pas dans les médias » insiste-t-elle.
Une journée mondiale de sensibilisation à l’autisme jugée insuffisante
Ce dimanche 2 avril aura lieu la journée mondiale de sensibilisation à l’autisme. Une initiative dédiée à toutes ces familles qui vivent avec ce handicap au quotidien, avec pour but de médiatiser l’autisme. Même si cette journée permet de mettre en lumière les TSA, elle est jugée insuffisante par les principaux concernés. Stéphanie Clément s’interroge : « qu’est-ce qui est fait concrètement ? ». « Il y aura deux ou trois reportages à la télé […] avec des personnes soit hyper intelligentes soit avec un niveau d’autisme hyper fort, puis [on] considérera que « ça y est, c’est fait » mais seulement ça ne suffit pas » regrette-t-elle. La mère de Sacha ajoute « ça ne suffit pas parce qu’il y a plein d’autres formes d’autisme, et celles-là ne sont pas montrées […] c’est dommage ». Mettre fin aux préjugés sur l’autisme, un grand défi pris à bras le corps par toutes ces familles. Nul doute que pour y parvenir, une plus ample médiatisation semble nécessaire, pour une meilleure inclusion dans la société.
Clément Guillonneau