
Loi intégration et immigration, victime de la réforme des retraites
Le texte, susceptible de générer de nouvelles tensions, devait être discuté au Sénat le 28 mars. Il a été déprogrammé du calendrier parlementaire mais pas abandonné. Les associations de défense des migrants, les syndicats et la gauche dénoncent un texte trop strict et liberticide.
Une centaine de manifestants réunis devant la mairie de Bayonne, dans le Pays basque pour protester contre la loi Darmanin. Crédit : Paul Tilliez.
Première victime de la crise politique et sociale causée par la réforme des retraites, le projet de loi censé “contrôler l’immigation” et “améliorer l’intégration” porté par Gérald Darmanin et Olivier Dussopt. Il ne sera pas débattu le mardi 28 mars comme prévu. Jugé trop controversé et problématique, la date est repoussée par rapport au contexte déjà tendu de la réforme des retraites suite à l’adoption de celle-ci par l’article 49.3 de la Constitution. Déjà reporté plusieurs fois, le texte de loi promettait notamment d’accroître l’efficacité de l’intégration des étranger dans le pays en rendant obligatoire l’acquisition d’un certain niveau de langue française pour l’obtention de titres de séjour longue durée était facilitée, l’expulsion du territoire français d’étrangers sans titre de séjour en simplifiant les procédures administratives.
“Il est inutile de faire cela la semaine prochaine, cela va tendre tout le monde”
Gérard Larcher, président Les Républicains du Sénat a suggéré l’idée auprès d’Emmanuel Macron lors d’un déjeuner à l’Élysée le mardi 21 mars, de reporter l’examen du projet de loi au Sénat, pourtant déjà discuté en commission des Lois et programmé à partir du 28 mars. “Il est inutile de faire cela la semaine prochaine, cela va tendre tout le monde”, a-t-il déclaré, selon un conseiller de l’exécutif. Le chef d’État aurait été sensible à ses déclarations. Lors d’une réception de tous les parlementaires de la majorité à l’Élysée, mardi soir, Emmanuel Macron affirmait : « Nous devons avancer sur trois progrès majeurs pour les Français : la santé, l’école et l’écologie. ». Le gouvernement ne ferait donc plus de la lutte contre l’immigration son premier objectif.
La droite coincée pour le vote de futurs textes
Au-delà du projet de loi immigration, le gouvernement devrait continuer de rencontrer des difficultés pour faire passer ses textes à l’Assemblée nationale. Un tiers des députés LR ont voté en faveur de la motion de censure transpartisane pour renverser Élisabeth Borne et son gouvernement. Pour ses futurs projets de loi, LREM risque de rencontrer les mêmes difficultés puisqu’elle ne dispose pas de la majorité absolue au Palais Bourbon. “Comment on va faire concrètement demain pour que d’autres textes soient débattus ?”, demandait Aurore Bergé, présidente des députés LREM, sur TMC le lundi 20 mars. Du côté de la gauche, on continue de dénoncer une assemblée non représentative des idées du peuple. “Les Français attendent un changement politique, on doit simplement redonner la voix au peuple”, déclarait Louis Boyard sur Franceinfo lundi 20 mars.
Une loi qui sera découpé en plusieurs textes
Le projet de loi va être découpé en “textes plus courts” et sera examiné “dans les prochaines semaines” a annoncé Emmanuel Macron le mercredi 22 mars au journal télévisé de 13 heures. Il est désormais prévu un « projet de loi plus court et plusieurs propositions de loi », a expliqué un conseiller de l’exécutif. Une méthode qui déplait à la gauche puisque découper le texte initial en plusieurs projets de loi permettrait de mieux “faire passer la pilule” tout en durcissant les principes de celle-ci.
Les associations de défense des migrants, les syndicats et la gauche révoltées, se réjouissent du décalage de la date
Les associations de défense des migrants, les syndicats et la gauche s’inquiètent de ce nouveau projet de loi et dénoncent un texte trop strict et liberticide. “Ce qu’on voit en étudiant le projet, c’est que l’essentiel des mesures est répressif et sécuritaire, avec une assimilation de l’ensemble des étrangers à des délinquants. C’est inquiétant ! ”, explique Céline Le Guay, membre du collectif AERéSP28. “La droite sénatoriale a rendu le texte encore plus discriminatoire, injuste et inefficace ! La logique sécuritaire domine mais sans surprise le volet “intégration” est un grand absent du texte”, affirme Jacques Fernique, sénateur écologiste du Bas Rhin sur Twitter.
Jacques Fernique, sénateur écologiste du Bas-Rhin affiche le constat d’une loi discriminatoire, injuste et inefficace. Crédit : Twitter.
Des manifestations dans plusieurs villes françaises
Des manifestations ont eu lieu, le samedi 25 mars, dans plusieurs grandes villes en France réunissant des dizaines de milliers de manifestants telle que Paris, Lyon, Montpellier, Marseille et Lille, mais aussi dans des villes de taille moyenne comme Grenoble où entre 400 et 500 personnes se sont rassemblées. Ils appellent au retrait total du projet de loi. Des milliers de personnes avaient également manifesté dans les grandes villes françaises le 18 décembre à l’occasion de la Journée internationale des migrants pour protester contre le projet de loi, qualifié de “raciste”.
Romane Passet, Flavie Veillas, Lucie Verdier, Dunvel Ramalingum