Un petit bout d’Ukraine sur la Côte d’Azur grâce à l’Afuca

À deux pas de la toute nouvelle gare Saint-Augustin dans l’ouest de Nice, entre deux barres d’immeuble, se niche, un grand bâtiment bleu de quatre étages. C’est ici qu’est installée, depuis 2016, l’Afuca (Association Franco-Ukrainienne de la Côte d’Azur). Initialement crée pour promouvoir la culture ukrainienne dans la région, l’association est malgré elle devenue, au fil du conflit russo-ukrainien, l’un des plus importants « hub humanitaire » des Alpes-Maritimes.

Avec plus de 11 000 demandes d’aide administrative traitées depuis 2016, l’AFUCA est l’association d’aide aux réfugiés ukrainien la plus active des Alpes Maritimes. Photo DR Afuca

Arrivés à l’adresse, un immeuble industriel vieillissant au cœur d’un Nice en travaux, nous sommes accueillis par un service de sécurité et une grande pancarte bleu ciel et jaune sur laquelle on peut lire « Free Ukraine ». Après un court échange avec un responsable de la préfecture au troisième étage, nous rencontrons finalement Oksana Basova un niveau plus bas.

« Permettre aux enfants de poursuivre la découverte de leur culture« 

Oksana est la « responsable du département éducatif de l’Afuca ». Rapidement, elle nous invite à la suivre. Au bout d’un long couloir, se trouve « l’école ukrainienne« , l’une des missions phare de l’association.

Sur des bancs d’école s’entassent des cartables Cars, Hello Kitty et autre Spider-Man, alors que sur les murs, des dessins, des coloriages et des poèmes en alphabet cyrillique couvrent presque entièrement la peinture blanc cassé. « Ici, nous avons deux groupes d’âges, un pour les 3-6 ans et un pour les plus âgés jusqu’à 12-13 ans » explique celle qui était directrice d’une maternelle à Kiev avant de fuir le pays avec son fils en 2022.

Au programme ce matin-là, écriture et récitation de poèmes ukrainiens. « Les enfants sont scolarisés dans les écoles françaises bien sûr, mais c’est important qu’ils connaissent aussi leur propre culture » assure Oksana, avant de poursuivre « aujourd’hui, on accueille environs 70 enfants chaque mercredi et samedi, c’est une vraie fierté pour nous ».

Après une heure de leçons, les écoliers sont lâchés pour une première récréation. Entre les parents, les enfants courent, sautent et crient, le couloir en guise de terrain de jeux, et l’imagination reprend ses droits. Oksana profite de la pause et nous emmène chez les tous petits, plus calmes, qui, dans la pièce mitoyenne, sont en pleine session coloriage.

Grâce aux nombreux dons de matériel, « l’école ukrainienne » dirigée par Oksana Basova n’a rien à envier aux classes traditionnelles. Photo Vadim Milliex

Une micro-société

Alors qu’elle s’apprête à emmener sa petite troupe en sortie, Oksana nous présente Vitoria qui prendra le relais de la visite. Dans ce qui semble être une salle d’attente, plusieurs personnes, tous âges confondus, patientent là, dans des canapés. Dans la pièce voisine sont assises derrière quatre bureaux des femmes « en consultation ».

Vitoria nous explique que dans ce lieu, décoré de toutes parts aux couleurs de l’Ukraine, sont « traitées les demandes et les besoins administratifs des ressortissants ukrainiens de la région« , une autre mission majeure de l’association. « On s’occupe de milliers de demandes », assurance, déclarations de revenus, recherche de logement, l’Afuca propose aux réfugiés ukrainiens « un soutien administratifs au quotidien » nous explique-t-elle.

Comme elle, cinq personnes sont « salariées par l’association grâce à l’aide de la mairie » et se consacrent « à plein temps à l’aide des populations réfugiées ». Pour les adultes aussi, l’association propose des activités culturelles et sportives avec notamment « des cours de danse, de yoga, mais aussi des cours de français pour faciliter la vie des Ukrainiens en France ». Après nous avoir montré le studio de danse, Vitoria nous propose de descendre voir un autre lieu essentiel pour l’Afuca, « le stock ».

Rendez-vous au rez-de-chaussée du bâtiment donc, Vitoria nous guide dans un immense hangar. « Ici ce sont les douches et les vestiaires dédiés aux personnes en difficulté » dit-elle en nous montrant plusieurs Algeco, on apprend alors que les locaux sont en partis partagés avec le SAMU social qui héberge ici temporairement des femmes et leurs enfants en situation de grande précarité.

Un peu plus loin, derrière une première porte, se trouvent « des vêtements, des livres et des jouets offerts par des donateurs français » pour la plupart destinés « aux familles de réfugiés les plus précaires » parfois « obligés de quitter leurs maisons sans rien pouvoir emporter avec eux », nous explique Vitoria. Quelques mètres plus loin, derrière une seconde porte, un second local est quand lui « dédié à l’aide alimentaire d’urgence« . Une ressource en nourriture « cogéré avec le secours populaire », avec une distribution quotidienne « essentielle pour les réfugiés les plus précaires », selon elle.

870 tonnes de matériels envoyés en Ukraine

Enfin, Vitoria nous emmène dans « le gros stock ». Sur une surface d’une centaine de mètres carrés, des milliers de colis, fourniture médical et mobilier en tous genres recouvrent le sol. C’est ici que se joue, depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, l’une des batailles les plus importantes de l’Afuca, l’aide aux soldats ukrainien. « On reçoit des colis d’autres associations ukrainiennes partout en France que nous trions ici », nous explique Vitoria en désignant une masse de cartons empilés au centre de la pièce. « Ici, c’est tout ce qui est médicaments, bandages », poursuit-elle en nous montrant un espace séparé du reste de la pièce, remplis-lui aussi de cartons.

 Et puis, au milieu de ces monticules de biens de première nécessité, se dessine la silhouette d’une femme géante allongée à la romaine sur une sorte de socle en plastique dur. « C’est l’atelier d’une artiste ukrainienne, elle a fui la guerre et gère depuis son arrivée à Nice ce petit atelier », réagit Vitoria en voyant nos visages interloqués, « ce sont ses créations, elle donne des cours de sculpture et de peinture ici aussi ». Grand lieu d’accueil, d’aides et de logistique humanitaire, les locaux de l’Afuca sont aussi et surtout un fragment de « chez soi » pour des milliers d’Ukrainiens ayant fui la guerre. Une ligne de front imaginaire, mais bien palpable à plus de 3000 kilomètres de Kiev.

Léon RIVA

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