Carte de presse : des conditions d’attribution remises en question

Dans une tribune parue dans Télérama, deux cents journalistes ont dénoncé des conditions d’attribution de la carte de presse n’évoluant pas au même rythme que la profession. Retour sur ces conditions et réponse de la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels.

34 444 journalistes possédaient une carte de presse, en France, en 2023. Image DR CCIJP, extraite de l’infographie : Info ou Mytho ?.

Plus qu’une carte, c’est un symbole unique de la liberté de la presse et de la démocratie. La carte de presse est, en France, une carte d’identité professionnelle. Elle est essentielle aux journalistes pour accéder facilement à l’information. Ils peuvent pénétrer dans certains lieux et événements (bâtiments privés, conférences de presse, ministères, salons, musées, spectacles, etc.). Elle leur est également essentielle pour être protégé (manifestations, guerres, etc.). Depuis sa création en 1936, elle est attribuée par la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) qui établit plusieurs critères. Le demandeur doit exercer des fonctions journalistiques dans une entreprise ou une agence de presse agréée, de façon régulière et rétribuée, et en tirer plus de la moitié de ses ressources. Des critères qui sont aujourd’hui très critiqués par certains journalistes, qui doivent renouveler la demande de leur carte chaque année, avec toujours l’appréhension de ne pas se la voir (ré)attribuée.


La CCIJP : le “baromètre” des pratiques du journalisme ?

Une tribune signée par deux cents journalistes, dont certains lauréats du prix Albert-Londres, a été publiée dans Télérama en janvier dernier. “Nous, signataires de cette tribune, dénonçons la position de la CCIJP qui nous
semble à la fois absurde, dépassée, et d’une grande injustice sociale. Nous demandons une évolution du mode d’attribution de la carte de presse et nous plaidons pour que la nature journalistique de notre travail soit un
critère déterminant pour l’obtenir, comme c’est le cas chez la plupart de nos voisins européens.”, dénoncent-ils. Les journalistes doivent notamment fournir leurs trois derniers bulletins de salaires lorsqu’ils font leur demande,
pourtant, certains prétendent mériter davantage la carte, quant à la qualité de leur travail. Ce à quoi a répondu Kathleen Grosset, secrétaire générale à la CCIJP, lors d’une conférence à l’IUT de Cannes-la-Bocca : « Qui est-on
pour juger la qualité ? Vous n’avez pas la même idée que moi de la qualité ! La commission n’invente pas de critères. Elle applique la loi. On ne juge pas le travail ou les publications. »


Les propositions de la CCIJP aux États-généraux de l’information

Suite à ces accusations, la CCIJP a tenu à défendre sa position aux États- généraux de l’information en rétorquant qu’elle ne refusait que « 1,5 à 2 % des demandes » chaque année, et en formulant dix nouvelles mesures. Parmi elles, consolider le salariat, mieux soutenir le reportage audiovisuel ou encore soutenir les journalistes correspondants à l’étranger. « Cette exigence, c’est aussi une protection pour vous. Il ne faut pas se tromper de cible. Nous ne sommes pas sourds face à ce qu’il se passe ! », déclarait Rodolphe Peté, correspondant régional de la CCIJP pour la région Côte d’Azur-Corse, également présent à la conférence à l’IUT de Cannes-la-Bocca. Des progrès à faire à une époque où, selon l’Observatoire du journalisme, l’emploi de journalistes rémunérés en pige ou en CDD, est passé de 17 à 25 % entre 2001 et 2022, une précarisation qui ne leur permet pas de cocher les cases pour l’obtention d’une carte de presse.

Romane PASSET
édité par Lila HECHAM

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