Les oubliés de la carte de presse

Photojournalistes et réalisateurs de documentaire font face à des difficultés d’accès à la carte de presse. Un phénomène conjoncturel pour les premiers, structurel pour les seconds.

Rodolphe Peté, à gauche, et Kathleen Grosset, au pupitre, exposent les données relatives à la carte de presse. En 2023, 34 051 journalistes étaient titulaires du sésame. Photo Aurélian Marre

Symbole d’appartenance à la profession de journaliste, la carte de presse est un outil crucial pour l’identification et la protection des journalistes professionnels. Une baisse du nombre de cartes accordées de 9% sur la décennie écoulée, est à noter selon France Inter. C’est pourquoi, l’obtention de cette carte représente un véritable défi pour certains acteurs du domaine, notamment pour les photojournalistes et les réalisateurs travaillant au sein d’une boîte de production.

1 200 rencontrent des problèmes pour son obtention

Kathleen Grosset est secrétaire générale de la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIPJ). Elle souligne que « sur les 35 000 professionnels possédant la carte de presse, 1 200 rencontrent des problèmes pour son obtention ». Ces difficultés sont notamment dues à des critères stricts de rémunération. Pour être éligible à la carte, un journaliste doit percevoir en moyenne 627 € par mois en tant que revenu principal lié au journalisme. La raison principale des refus est souvent le manque de rémunération suffisante.

Les photojournalistes sont concernés par ce rejet. En dix ans, le nombre de titulaires de la carte de presse a chuté de 45 % dans leur domaine, une baisse expliquée par les mutations économiques dans le secteur. « L’avènement du numérique a réduit le prix des photos, et les agences de presse comme les journaux ont commencé à produire leurs propres images » détaille Kathleen Grosset, diminuant ainsi la demande pour les travaux des photojournalistes indépendants. Cette situation économique précaire rend difficile pour eux la réponse aux critères de rémunération exigés pour la carte de presse.

Les réalisateurs n’y ont pas accès

Au-delà des photoreporters, les réalisateurs, de par leur statut d’intermittent du spectacle, ne sont même pas reconnus comme des journalistes au sujet de l’attribution de la carte de presse. Cette distinction statutaire crée une barrière supplémentaire pour ces professionnels. Ils luttent pourtant pour être considérés comme journalistes à part entière, comme en témoigne un communiqué de la Guilde des auteurs-réalisateurs de reportages et de documentaires (GARRD).

Pour Rodolphe Peté, journaliste pour Var-Matin et correspondant régional pour la CCIJP, « un photographe de presse, c’est un journaliste », lui qui souligne « l’importance » de ces professionnels dans la diffusion d’informations, au même titre que les réalisateurs de documentaire. Cependant, comme le note Kathleen Grosset, « la baisse du nombre de photojournalistes n’est pas imputable uniquement à la commission d’attribution de la carte de presse », mais reflète des changements plus larges dans le paysage médiatique et l’univers journalistique français.

Aurélian Marre
Edité par C.C.

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