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Loeb/Ogier : meilleurs ennemis ou pires amis ? #2
Sébastien Ogier et Sébastien Loeb se sont souvent croisés, mais rarement réellement affrontés. À cause notamment d’une collaboration malvenue en 2011 chez Citroën. Pourquoi leur accrochage était-il inévitable ?
Programmés pour être adversaires ?
Avant même l’arrivée d’Ogier chez la marque aux deux chevrons, Sébastien Loeb l’avait prévenu : « Je lui avais dit avant qu’il vienne de ne pas venir, que ce serait la merde ! ». Avant de poursuivre : “Tout ce qui a été dit était, en majeure partie, du cinéma. Les moments où ça a été le plus chaud, par exemple en Grèce, on mangeait ensemble les soirs de course, avec nos copilotes. Il y avait une rivalité sportive évidemment mais ce n’est pas pour cela qu’on se détestait dans la vie, contrairement à ce que beaucoup ont essayé de faire croire. Notre relation a toujours été correcte. Quand on se croise, on ne s’évite pas. La presse a monté ça en épingle. Après, j’ai compris sa décision de partir de Citroën. » Depuis, leur relation s’est assainie, les deux pilotes seraient même devenus amis. En plus d’être français, d’avoir été révélés par Citroën, d’avoir du talent, et de s’appeler Sébastien, ils ont un autre point commun : ils résident tous les deux en Suisse, pour des raisons fiscales. De quoi créer une amitié ?

Ce n’est qu’une fois adversaires qu’enfin les deux Sébastien pouvaient être amis, ou du moins complices. À gauche, Loeb avec sa combinaison Citroën, à droite Ogier aux couleurs de Volkswagen. (Crédit photo : D.R.)
Tuer le père
La plus grande rivalité de l’histoire du sport auto a des similitudes avec celle des deux Sébastien. Le pilote de formule 1 Senna voulait battre Prost avant qu’il ne se retire. Même le perchiste Renaud Lavillenie avait à cœur de détrôner Sergueï Bubka, recordman du monde pendant plus de 25 ans en saut à la perche. « Tuer le père » semble être indispensable lorsqu’on est sportif de haut niveau et que l’ego est proportionnel au talent. Il vaut mieux être adversaire pour se tirer la bourre… En rallye, ce genre de problème interne avait déjà eu lieu, notamment chez Peugeot avec l’épisode Delecour – Panizzi.
Dans une interview donnée au journal Le Monde, Ogier parle de Loeb comme étant son modèle : « On a tous besoin d’un modèle et aussi de points de repère. Seb a été le mien. J’avais accès à ce qu’il faisait. Je pouvais comparer mes réglages aux siens. Je me suis étalonné, comme lui l’avait fait à ses débuts avec Sainz ou [Colin] McRae. Son système de notes nous a inspirés également, mon copilote Julien Ingrassia et moi ». Mais il ne souhaite pas être comparé à lui : « Nous avons dix ans de différence, donc une génération d’écart. Si j’avais dix ans de moins, nous aurions pu en effet nous affronter. Maintenant, je fais mon maximum pour piloter rapidement. Concourir contre lui a été une grande expérience pour moi pour découvrir mes limites », a conclu Ogier. Les deux champions ne se sont jamais réellement disputés un titre sur une saison entière, au top de leur forme. La faute à un écart de dix ans entre le père Loeb et son fils Ogier. Ce qui laisse libre cours à l’imagination, pour savoir lequel des deux aurait gagné l’année dernière si Loeb avait disputé tous les rallyes. Dans dix ans, Ogier pourrait devenir père à son tour avec, qui sait, une belle bagatelle de titres de Champion du monde à son actif. Et peut-être que son héritier, encore inconnu, mettra un terme à sa carrière lors d’un Rallye de Monte-Carlo, chez lui à Gap, de la même manière qu’il a envoyé Loeb à la retraite à Haguenau.

Cette image restera la dernière de Sébastien Loeb en WRC. L’alsacien sur ses terres a été victime d’une sortie de route. Comme un symbole de passation de pouvoir, c’est Sébastien Ogier qui a remporté ce rallye. (Crédit photo : D.R.)
Jérémy Satis