Le côté sombre de YouTube

AnthoxColaboy et Superflame donnent une conférence d’alerte sur YouTube – @EnoraHillaireau

Les youtubeurs AnthoxColaboy et Superflame ont donné le samedi 9 février une conférence au festival PlayAzur, sur les dangers de YouTube

Que se passe-t-il dans les coulisses d’un youtubeur ? AnthoxColaboy et Superflame racontent sans détour leurs expériences et combattent les idées reçues ; à commencer par leur salaire : « Je suis désolé moi je ne gagne que 10 000 euros par mois et je n’ai que cinq appartements, c’est très difficile à vivre », lance Superflame pour détendre l’atmosphère. Pour les deux acolytes, la relation avec YouTube est proche de l’addiction, avec des exigences de rentabilité toujours plus hautes. AnthoxColaboy confesse : « Au début 100 vues c’est juste génial. Aujourd’hui pour avoir la même dose de dopamine dans le cerveau, il m’en faut au moins 100 000 ». Il y a la nécessité de plaire à une audience et de la satisfaire quitte à simplement suivre les tendances « sinon tu te retrouves à manger des pâtes » raille Superflame. Celui-ci est connu pour ses imitations de Homer Simpson et déplore être cantonné à cette catégorie d’imitateur. Lorsque les statistiques baissent, les youtubeurs se demandent comme des enfants si le public a cessé de les aimer : « YouTube est très fort pour résumer ton travail à des chiffres », assènent-ils.

« C’est un métier ubérisé »

Le paradoxe de YouTube c’est l’écart entre la rémunération et la popularité des individus : « Je me fais souvent arrêter par des fans dans la rue et pourtant, je gagne le SMIC », lâche AnthoxColaboy. « C’est un métier ubérisé » complète Superflame avant de souligner que certains ne daignent pas considérer leur travail comme un métier et estiment illégitimes les revendications des youtubeurs. « On ne parle pas assez du côté négatif de YouTube » justifient les conférenciers « pour la plupart, c’est uniquement un monde de paillettes ». Les conditions de travails y sont très particulières. Pour AnthoxColaboy, c’est un métier très solitaire. Il confie avoir coupé toute vie sociale et familiale pendant 3 ans pour « avoir des idées qui peuvent plaire » ; ce qu’il déconseille fermement à tout nouvel utilisateur qui souhaiterait se lancer : « C’est une obsession, mais ça peut vite nous bouffer ». Superflame confirme par un hochement vigoureux de la tête. 

Le modèle de rémunération n’est pas viable

Les youtubeurs sont rémunérés par des campagnes publicitaires qui varient selon les périodes de l’année. Celle qui s’étend de novembre à janvier rapporte deux fois plus que l’été où la période est creuse, car les vacanciers se déconnectent de la plateforme. Mais depuis 2016, l’application a mis en place un algorithme de « démonétisation » qui supprime la publicité d’une vidéo qui fait des allusions sexuelles ou des appels à la violence. Ce système, encore nouveau, s’améliore à partir de ses erreurs, et sanctionne parfois injustement certaines personnes. « Tu peux dire “c’est là que j’habite” et l’algorithme va comprendre “bite”, à toi de prouver qu’il se trompe », ajoute Superflame pour illustrer. Il a été notamment reproché à la plateforme de censurer tout particulièrement le corps des femmes. Basée sur le droit américain et non français, l’application empêche les utilisateurs de gagner de l’argent avec des parodies ou des citations, légales dans le droit français. « C’est dégradant et diabolique », commente AnthoxColaboy.

D’une manière générale, YouTube prend de façon « impartiale » 50 % des revenus du youtubeur. Les networks qui proposent un suivi personnalisé pour les débutants, un accès à des plateformes de musique libres de droits et une protection juridique, prennent également entre 30 % et 40 % de la rémunération. Les conférenciers donnent alors un dernier conseil aux futurs créateurs de chaîne : « Ne prenez pas de network si vous n’avez pas au moins 100 000 abonnés. C’est hyper gratifiant, mais ça change très vite ». 

Lolita Aboa

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